Non au changement du nom de la ville de Brazzaville.
Le changement du nom de la ville de Brazzaville semble devenu un enjeu...capital.
L’auteur de « Jazz et vin de palme », Emmanuel Boundzéki Dongala, dénonce une anomalie historique : le nom de Brazzaville (du nom du franco-italien Pierre Savorgnan de Brazza qui fonda la ville)
Dongala Boundzéki Emmanuel, homme de lettres, ne supporte plus que des colonisés continuent d’honorer un colon en refusant de remettre en cause le fait que Brazzaville continue de s’appeler Brazzaville, soixante ans après les Indépendances africaines. Honteux stigmate !
Boundzéki l’a fait comprendre dans un article paru dans Mondafrique.
De quoi réveiller dans sa tombe son homonyme Rapha Boundzéki Afara, qui se disait très fier d’être Brazzavillois , « mérité des mérités »
Pour l’écrivain congolais, né à Bangui, en perpétuant cette aliénation patronymique , il y a crime de lèse majesté. Notre capitale ne devrait plus s’appeler Brazzaville. Il faut, selon lui, faire preuve d’authenticité (on va dire mobutienne) comme Léopoldville devenue Kinshasa, Fort-Lamy Ndjaména, Lourenço Marques Maputo. Aussi le fait de continuer de conserver ipso facto le nom de Brazzaville d’origine transalpine, est une involution humiliante anhistorique, contre-nature, honteuse ; autant demander à un enfant de retourner dans le sein de sa mère ou à un malade de manger ses vomissures.
Voici ce que dit Emmanuel Boundzéki Dongala, dans le journal en ligne Mondafrique.
« Une verrue honteuse entache la capitale de la République du Congo, son nom : Brazzaville ! Il n’est que temps de se débarrasser de ce nom qui honore la mémoire du colonisateur qui a conquis le pays, Savorgnan De Brazza. »
« Trêve de néocolonialiste !La ville doit changer de nom ! » s’indigne et décrète E. Dongala.
Cette petite musique venue d’outre-fleuve, de plus en plus entendue, n’est pas seulement fredonnée par l’auteur de « La Sonate à Bridgetower ». Nombre de compatriotes zélés en manque de combats majeurs à mener, avaient embouché le clairon de la désaliénation en proposant des noms atypiques comme Mavoula, Tandala, Mfoa, Cuna Ntamo, Nguélé, Makokoville etc.
Pourquoi pas Mbochipolis pendant que nous y sommes ! Au moins on serait en harmonie avec le statu quo oyocrate en vigueur depuis le 5 juin 1997 dans l’espace urbain allant de Madibou à Djiri.
Le 18 mars
Quand Ngouabi mourut en 1977, un délire ethnocentriste s’empara de ceux qui assassinèrent L’immortel Président. Les tueurs (rappelle à juste titre Emmanuel Boundzéki Dongala) se mirent à proposer, en guise de substitution onomastique, des appellations incontrôlées comme Ngouabi-ville, Pays de Marien etc.
Comme Sassou n’a jamais organisé une élection jamais perdue, il serait aberrant (comme l’appelle de ses vœux notre écrivain) de procéder à un Referendum pour déterminer la conservation ou non du nom de Brazzaville dérivé d’un Français d’origine italienne, Pierre Savorgnan de Brazza, né à Udine vers la frontière autrichienne.
Opération Mouébara, avenir des Mbochi
La consultation populaire sera une occasion propice pour le grand baptiseur devenu grand débaptiseur, heureux de donner à Brazzaville le nom de Mouébaraville (en hommage à sa mère) ou Edithbongoville (en souvenir de sa fille) ou alors en bon mégalomane, celui de Sassouville ou Nguessoville, comme le boulevard qui quitte l’aéroport de Maya-Maya jusqu’à Mpila, ou l’Université de Kintélé, ou la noria d’éléphants blancs typiques des quarante ans de règne sans partage.
Oyo la capitale
Rusé comme un renard, Sassou a devancé les velléités mégalopoliciennes redoutées par Dongala et compagnie. La capitale du Congo se trouve désormais à Oyo, ex-petit campement de pêcheur au bord de l’Alima. Gardez votre Brazzaville. Désignez-là comme bon vous semble. Tandala, Béa la capitale, Mbanza-Kongo etc. Comme Mobutu Guadolite, L’empereur Sassou possède Oyo, petit joyau urbain au milieu de la forêt équatoriale.
Du reste Sassou n’a consulté personne pour changer les noms des départements du Territoire. Djoué-Léfini par-ci, Likouala Oubangui par là, Léfini-Alima par-là etc.
Rétropédalage
Il n’a pas échappé à Boundzéki que les desseins du peuples sont impénétrables en matière identitaire. Dongala constate une incongruité :
« Certes, la petite ville de Dolisie fut un moment rebaptisée Loubomo, de son nom local, mais cela ne dura pas, on revint très vite sur cette décision et la ville porte toujours aujourd’hui le nom du compagnon de De Brazza. »
Que faut-il comprendre ? Infantilisation populaire ou rejet de la démagogie philo-marxisante populiste du Pouvoir ?
On a rejeté aux calendes grecques l’appellation Loubomo comme l’emblématique Drapeau rouge frappé d’un marteau et d’une faucille ainsi que l’hymne national Les Trois Glorieuses pour réhabiliter La Congolaise et la devise Unité-Travail-Progrès. L’école Pierre Ntiété à Ouenzé est redevenue Saint-Michel et Paul Ntsondé Immaculée Conception. Vous parlez d’une congolisation !
Qu’en pense Emmanuel Boundzé Dongala ?
Ce que veut le peuple
Par les temps qui courent, n’est-il pas plus urgent de donner à cette fameuse ville capitale un réseau électrique fiable, de l’eau potable, des routes bitumées, des écoles, des hôpitaux, des musées que d’enclencher des discussions byzantines sur le sexe des anges ?
N’est-il pas impératif de remplir l’assiette des Congolais, de verser les salaires impayés des fonctionnaires, de donner des bourses d’étudiants que se demander pourquoi Brazzaville continue de porter le nom de son fondateur, Pierre Savorgnan ?
Celui qui a écrit « Johnny chien méchant », ne devrait-il pas se demander comment éradiquer le phénomène cruel des Bébés Noirs, délinquants urbains instrumentalisés par le Pouvoir, semant un setiment insoutenable de peur sur la ville ?
La question fondamentale est moins de susciter des débats sur le bien-fondé de l’appellation de Brazzaville que d’élaborer les meilleures politiques de notre ville, Brazzaville, capitale d’un pays producteur de milliers de quintaux d’hydrocarbures/jour dont l’état délabré des infrastructures ferait peur à Maciste si on lui demandait de les nettoyer !
Villes nouvelles
Emmanuel Boundzéki Dongala, est pourtant connu pour des combats plus profonds dignes des auteurs comme Hamadou Kourouma, Chinua Achebe Wole Sonyka, Sony Labou Tan’Si.
Le nom de la capitale ne nous convient pas ? Faisons comme les Ivoiriens qui changèrent non pas le nom de leur capitale mais le lieu de celle-ci : Yamoussokro. Idem les Nigerians qui déplacèrent leur capitale de Lagos à Abudja.
En vérité les enjeux portent sur l’aménagement du territoire. Il faut créer des villes nouvelles. Lorsque les cités essaiment dans un pays, la bataille de leur appellation devient obsolète.
Il existe un oiseau (le coucou) qui ne construit jamais de nids. Il squatte celui des autres. Il est temps qu’on ne passe plus notre temps à débaptiser les structures léguées par la colonisations.
Wa dia fwa yika dio.
Construisons nos propres structures urbaines ! Améliorons l’héritage colonial. On pourra les appeler comme bon nous semble, par exemple Angouandza-ville, Léboulo-city, Lékakapolis, Mboulamoutombo, Makana I, Paris-Boko, Loufoua la nkari etc.
Qu’on fiche la paix à notre capitale Brazzaville, (capitale de la France Libre) dont certains opportunistes zélés veulent à tout prix changer le nom comme si en procédant à une métamorphose patronymique la ville de Brazzaville ( parmi les plus sales d’Afrique) se transformerait en petite Genève, au bord du lac Cuna Ntamo ou Pool Malébo ou Stanley Pool.
Averda, l’éboueur officiel de la ville, aux mains du petit-fils de Sassou, Odimba Omar Bongo Junior, a tellement démérité que la charge de la propreté de la capitale est en voie d’être cédée à partir de décembre prochain, à une entreprise Ottomane turque. Ce n’est pas, bien entendu, pour ce nouveau deal que Brazza la verte reprendra ses couleurs d’antan qui enchantèrent l’Inspecteur des Ecoles, le Français André Davesne.
Poto Moyindo
Kinshasa n’a jamais été poubelle urbaine que depuis qu’elle n’est plus Léopoldville.(1)
Bombardée Kinshasa sous la main de fer d’un Mobutu subitement devenu chantre du retour aux racines africaines, Léopoldville (surnommée jadis Poto Moyindo par Antoine Moundanda) passe pour une déchetterie à ciel ouvert ; les artères des beaux quartiers de la capitale de l’ex-Zaïre sont devenues des décharges publiques.
Alors qu’est ce qui compte ? Le nom ou le renom ? La forme ou la fierté ?
Quel nom donner à la capitale du Congo ?
Qu’on l’appelle Longonia-ville, Mboka ya Sika ou Kitokoville ou Brazzaville ou Sophia-antipolis, tant qu’il ne fait pas bon y vivre, une ville ne vaut pas sa raison d’être. Elle demeure bidonville, favelas.
En définitive, ce n’est pas le nom qui fait la fierté des habitants, c’est l’habitat, les habitudes, les habitus. C’est moins les symboles que les infrastructures qui font la ville.
Quel que soit le nom qu’on donnera à la ville, quand on n’aura pas changer Sassou, briser sa mainmise sur le pays, casser la chape de plomb qu’il a mis sur la ville, on trouvera le nom de Brazzaville asphyxiant. Ce patronyme sera le symbole d’une existence perdue ; les citadins vivront le spleen parisien de Baudelaire dans contexte de pays pétrolier.
« Que ce nom de BRAZZAVILE soit jeté à la poubelle de l’histoire » clame Dongala.
Pour notre part : changeons le nom du Président, pas celui de la ville qu’il préside en toute illégitimité.
Jetons Sassou dans la poubelle de l’histoire. Brazzaville sera belle.
(1) Axelle Kabou dans "Et si l’Afrique refusait le développement" parle du coût faramineux que déclencha la zaïrianisation de Mobutu du point de vue administratif. Changer les cachets administratifs, les drapeaux, les enseignes, les garde-robes ruina le pays.