crise grave au sein du PCT en l’absence de Noumazalaye
PCT : l’orage passe mais le ciel reste nuageux
La crise qui couvait au sein du Parti congolais travail a éclaté la semaine dernière au grand jour. En l’absence de son secrétaire général, le président du Sénat, Ambroise Edouard Noumazalaye, en mission d’Etat à l’étranger, la majorité des membres du Comité central a en effet décidé de convoquer une session extraordinaire de cette instance. A l’ordre du jour de la réunion figurait la question de la refondation qui commençait à diviser sérieusement le parti tant sa signification est mal connue de la plupart des militants.
Des clivages étaient en effet apparus dans la compréhension des uns et des autres, ce qui avait fini par créer pratiquement deux courants au sein du PCT : celui des conservateurs qui ne veulent pas de la refondation perçue comme la liquidation du parti ; celui des réformistes qui pensent que le parti a fait son temps et qu’il lui faut trouver une nouvelle virginité à travers un nouveau nom et de nouvelles structures.
De cette querelle, les dirigeants ont fait les frais, les militants leur reprochant d’avoir jeté le trouble dans la conscience collective du parti en proposant une refondation dont ni la nature, ni le contenu, ni les contours politiques et juridiques n’étaient clairement définis. Ce qui, au lieu d’éclairer la compréhension des uns et des autres sur l’avenir du PCT, a contribué à semer la confusion chez les militants qui, cette fois, se sont affirmés résolus à voir plus clair avant de se prononcer.
A regarder les choses de près on découvre que la refondation du PCT s’apparente en réalité à un combat de titans. Depuis des années, en effet, on pensait le parti en pleine déconfiture, le procès qui lui fut fait en 1991, pendant la Conférence nationale, ayant laissé des stigmates encore visibles aujourd’hui. A l’occasion des différentes consultations nationales de ces dernières années, ses dirigeants avaient eux-mêmes montré des signes de doute puisqu’il n’était pas rare de les voir se positionner en adversaires sur le terrain, ou arborer des emblèmes autres que celui du PCT.
Au sein du parti lui-même les organes ne fonctionnaient plus comme l’exigent les statuts. Le dernier congrès du PCT datant de 1989, le parti était comme entré en hibernation, ce qui le conduisit, dans sa difficile remontée vers la surface, à expérimenter plusieurs alliances : avec l’UPADS de Pascal Lissouba, tout d’abord, pour gagner les élections de 1992, puis avec son rival de toujours, le MCDDI de Bernard Kolélas, pour changer la majorité et conquérir la primature. Mais à chaque fois le PCT a été trahi par ses alliés : Pascal Lissouba, imbu de sa théorie de la « tribu classe » et dynamisé par la fougue des faucons de la Mouvance présidentielle, n’a pas respecté ses engagements au moment de constituer son premier gouvernement ; pire encore, il n’a pas nommé un Premier ministre issu de l’opposition après qu’il eut perdu la majorité au Parlement, préférant renvoyer les Congolais aux urnes dans des conditions plus que discutables.
Le deuxième mariage politique du PCT, avec le MCDDI cette fois, s’est avéré tout aussi compliqué. Et cette alliance, que d’aucuns qualifiaient de « contre nature », n’a pas survécu à l’épreuve de la guerre du 5 juin 1997. Quant au dernier mariage, conclu avec un groupe de partis et d’associations proches du parti, il a été miné par les dissensions nées du partage du pouvoir qui ont jeté de l’huile sur le feu des passions. Depuis lors, le bateau tangue et les passagers de La Nouvelle Espérance sont inquiets, ce qui divise les dirigeants du parti paraissant relever plus des interrogations sur l’avenir politique de chacun que de la question de la refondation.
La vraie question, dans ces conditions, est de savoir avec qui faire le nouveau PCT et qui sera appelé à le diriger. Chacun, à ce stade, négocie son avenir politique qui peut se révéler incertain avec l’arrivée d’autres forces et, surtout, la création d’un nouveau parti sur les cendres du PCT. C’est pourquoi, après le rejet de l’idéologie marxiste et l’abandon des emblèmes de parti d’avant-garde certains n’hésitent pas à tirer sur la fibre sentimentale en affirmant que le PCT demeure le symbole de Marien Ngouabi, son fondateur, et que sa disparition consacrerait définitivement sa mort politique.
Si l’unanimité semble faite sur la nécessité de la refondation, il reste à donner à celle-ci un contenu qui concilie toutes les tendances dont l’agitation commençe à miner le PCT de l’intérieur. C’est, à peu chose près, la conclusion à laquelle a abouti le Comité central au terme de sa session extraordinaire du 12 au 15 novembre au Palais du Parlement. Le débat va donc se poursuivre au sein des instances dirigeantes, avant de descendre jusqu’à la base et de trouver son dénouement lors du congrès annoncé pour le mois de mars 2005.
L’orage est bien passé, mais le ciel demeure toujours nuageux.
Emmanuel Mbengué