Dans la production de la violence au Congo, les faits semblent montrer que l’ethnie est utilisée comme élément socioculturel d’identification et d’action politique. A cause de la violence et par instinct de survie face à des pratiques politiciennes de haine et de destruction les gens se reconnaissent d’abord en communauté de sécurité qui se trouve être ce que l’on appelle malheureusement en Afrique : l’ethnie.
Pour plagier quelqu’un, je dirais qu’au Congo la mobilisation à caractère identitaire s’est construite malheureusement sur un discours de dénonciation du fameux tribalisme ou ethnicisme (en réalité qui n’existe pas) du parti au pouvoir. C’est comme cela qu’est saisie, par une partie de la population exclue la détention excessive à tous les postes de décision dans l’appareil administratif et militaire de l’Etat colonial, des originaires de la même région que le président.
La constitution des opposants exclus, des revenus de l’Etat (qui reste le principal pourvoyeur d’emploi dans les pays d’Afrique) se fait en faction [1] tribale ou ethnique voire transrégionale. Elle ne se fait pas sur la base d’une idée politique ou de proposition alternative pour fonder une nation ou une société.
Tous les autres groupes ou communautés qui ne sont pas représentés dans les sphères de l’Etat, vont s’allier [2] pour faire partir du pouvoir central et de toute l’administration, ceux d’en face qui immédiatement, se trouvent isolés au plan national. C’est ce qui explique les jeux des alliances volatiles entre les trois majeurs espaces sous-culturels (Pays du Niari, Nord et Pool) qui se confondent en ethnicisme ou tribalisme d’où l’éternel recommencement des cycles d’opposition au Congo sur la base communautaire et l’explication simpliste de l’existence des ethnies et de leur conflit.
Les actuels exclus (futur inclus) ne font jamais et à aucun moment fonctionner les réflexes de solidarités dites tribales ou ethniques, pour résoudre au niveau autochtone et politique (le vrai) les problèmes sociaux. Pour que cela marche comme mythe, ils politisent tous les problèmes (sanitaires, sociaux, culturels, économiques, etc..) mais font tous l’erreur de promettre à ceux qui ne profitent pas du système (le lait et le miel) un meilleur accès aux ressources de l’état et de l’administration sur le fondement d’appartenance ethnique ou tribale. D’où le mythe de l’ethnie et pour les médiocres, les tentations de génocide pour homogénéiser le pays afin de s’assurer la pérennité du pouvoir central.
Seul l’accaparement des leviers du factice pouvoir colonial apparaît comme l’unique solution, et brandi comme spectre de l’unité et de la victoire. Celui qui arrive à conquérir le pouvoir colonial par ce biais apparaît comme le sauveur de la communauté (ethnie) et au nom de cela, peut tuer sans problèmes ceux des autres groupes « ethniques », le bonheur des uns vaut bien le sacrifice [3] des autres. De toutes les façons, les autres d’en face ba kélé bantu vé – bato té [4] On tombe dans les attitudes et discours de diabolisation des uns et des autres en optant pour l’idéologie xénophobe de la hiérarchisation.
Le politicien congolais dans sa médiocrité évidente et son manque de courage, qui pour garder sa place ou y accéder, est obligé de maintenir ce discours forcement haineux, xénophobe et plein d’incitation à la violence. Les membres du personnel politique sont conscients que seul un tel discours puisse leur garantir un soutien fanatique et aveugle de ceux qui sont dans la misère et l’ignorance.
On verra plus loin que ce n’est qu’un double mensonge, car dès que ces derniers obtiennent le pouvoir, ils ne résolvent en aucun cas les problèmes de la communauté. En aucun moment, l’ethnie qui a servi à prendre le pouvoir va contribuer au renforcement positif du lien social vers la solidarité à l’intérieur même de la communauté. Les logiques « ethniques » sociales sont vite abandonnées au profit d’une exploitation factieuse (cela se voit dans la répartition des postes) de la manne étatique[[Ici c’est le pétrole où l’on voit la famille et les proches de la tête du pouvoir s’accaparer tous les revenus sans se soucier de la condition de ceux qui les ont soutenu dans la « conquête du pouvoir central ». Ceux qui arrivent au pouvoir au nom de l’ethnie, mettent vite en place des schémas d’allégeance pour obtenir la soumission sans conditions des autres membres de leur communauté à l’exécution de leurs sales besognes.
L’ethnie de statut de fiction sociale devient un mythe politique, les populations civiles et les acteurs de la scène politique s’en servent à leur guise comme dans tous les mythes.
En fin de compte, à cause de la dilution du lien social tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du groupe, on aboutit à la violence récurrente et à des cycles interminables de guerres civiles.
La reproduction à l’infini d’un système infernal bourreau-victime-bourreau se développe comme normalité politique puis sociale.
L’ethnie de fiction sociale étant devenue mythe politique.