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Littérature africaine : merci Henri Lopes

Ce mercredi 12 février 2014, de 20h à
minuit, dans un célèbre hôtel parisien, l’écrivain
congolais Henri Lopes a donné une conférence sur le thème :
« La littérature
africaine entre singularité et universalité
 ». Un
moment gracieux.

C’est un Henri Lopes au
meilleur
de sa forme qui a abordé la littérature africaine devant
un parterre de « gens
intelligents
 », très cosmopolites. Electriciens,
maçons, chauffeurs de
taxi, écrivains, journalistes, éditeurs de renom…, tous
étaient aux anges et
ont congratulé Henri Lopes pour son brillant exposé. Le
sujet était risqué mais l’auteur
d’Une enfant de Poto-Poto, habitué à
ce genre d’exercices de style, s’en est sorti avec
majesté. Les « mots se
sont fait autres ; c’étaient comme des volutes de
fumée opiacées.
 » L’exposé
était structuré, bien construit. Il a illustré chacun de
ses propos par un
poème.

D’une voix portante, comme
s’il
voulait se détacher de son propre œuvre, Henri Lopes n’a
pas dit un mot sur
lui-même, sauf à la fin où, dans une tirade à la
François Hollande, il a égrené
les raisons de sa vocation d’écrivain. Il n’a parlé
que de grands noms de la
littérature africaine, de Sédar Senghor – qu’il avait
rencontré maintes fois -
à Wole Soyinka, en passant, bien sûr, par le boss de la
littérature congolaise
Tchicaya U’Tamsi puis Soni Labou Tansi... Seul hic, et la
question lui a été posée par
une écrivaine de renom, il a fait peu cas de femmes. Il
s’en excusé.

La singularité de la littérature africaine, c’est qu’au début c’était une littérature de combat, de revendications. D’où les oeuves comme « Une vie de boy » de Ferdinand Oyono, « Ville cruelle » de Mongo Beti...
Puis, au fil du temps, cette littérature est devenue une littérature d’amour c’est-à-dire que chacun peut s’accaparer où qu’il soit.

En fait, il n’y a pas une
littérature, mais des littératures africaines. Et Henri Lopes n’a pas manqué
d’insister sur une
distinction majeure entre les francophones et les
anglophones : «  Aux
francophones la poésie ; aux anglophones le
roman !
 » - « Et la littérature
magrébine dans tout ça ? »
a-t-on entendu dans la
salle. « Je ne sais
pas s’il faut considérer la littérature magrébine comme
étant africaine, et
pour cause, cette littérature-là a sa propre langue, la
langue arabe. Or la
littérature subsaharienne n’existe que qu’à travers
des langues d’emprunt, le
français, l’anglais, le portugais
 » a-t-il dit.

Mais la question de la
langue n’enlève rien à la singularité de la
littérature africaine. Au
contraire, cet emprunt rend universelle la littérature
africaine.

Puis un silence monacal s’est
emparé de la salle au moment où Henri Lopes a évoqué un
monstre sacré des
lettres africaines, dans une sorte d’hommage appuyé, en
l’occurrence Chinua
Achebe.

Les écrivains de la description pure

En intellectuel honnête, Henri
Lopes a dit que pour lui c’est Chinua Achebe le plus
grand. Jugement de valeur.
Certes le grand écrivain nigérian a
écrit « Le monde s’effondre », un livre traduit
en une vingtaine de langues. Mais il a écrit aussi « Le
Malaise
 ». Or d’aucuns (moi-même y compris) estiment
que c’est
justement un malaise que de lire ce livre, au même titre
que « Le soleil des indépendances » de Kourouma
ou son « Allah n’est pas obligé » ; L’âge
d’or n’est pas pour demain de Kwei
Armah, « Le devoir de violence » (Prix Renaudot
1968)de Yambo Ouologem… Des livres qui « pilonnent »
systématiquement l’Afrique : une écriture purement
descriptive. Souvent,
ces livres offrent des galeries de portraits de tyrans
africains. Soit ! Certains esprits
rétorquent que Dostoïevski a une écriture descriptive, et
cela n’a pas empêché
la critique de l’encenser. Erreur. L’auteur de
« L’Idiot » a brillé surtout pour l’acuité de ses
analyses
psychologiques. Et c’est ça qui a fait défaut à
Kourouma et les autres.
Pourquoi devient-on dictateur, sanguinaire ?
L’analyse est plus importante
que le diagnostic, et ça n’est pas un cliché. Le génie
du roman, c’est d’abord
la narration. La description ne sert qu’à respirer.
Voilà

 !Bedel Baouna

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