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Thierry Moungalla à la Conférence générale de la jeunesse : "économie numérique"

Provoqué par Collinet Makosso ( ministre de la jeunesse et de l’instruction civique) sur la lenteur du débit internet et sommé de se justifier devant les jeunes qui « enragent à ce propos » , le ministre Thierry Moungalla, bel orateur, s’est livré à un exercice didactique de haut vol. La scène s’est passé à la Conférence générale de la jeunesse, mercredi 26 février 2014, devant des ministres et des jeunes venus des quatre coins du Congo et de la diaspora.

Comme Monsieur Jourdain

Prenant la parole, le système du ministre des Postes et Télécommunications a consisté à expliquer en langage clair les raisons pour lesquelles internet, au départ incroyablement lent, s’est, ensuite, amélioré à petit feu (peut-être pas dans les cyber-cafés) mais à partir des supports IPhone, Smartphones. Après avoir fait l’historique de la communication au Congo, Thierry Lezin Moungalla a expliqué l’évolution de la fibre optique qu’il a subdivisée en trois phases. Même si la fibre n’est pas encore répandue sur l’ensemble du territoire, il ne reste pas moins que la première phase qui relie un téléphone portable aux différents réseaux sociaux est déjà opérationnelle au Congo. Somme toute, comme Monsieur Jourdain faisait la prose sans le savoir, les Congolais utilisent le haut débit sans s’en rendre compte. Et pan ! sur celui qui a failli savonner la planche sur laquelle on l’a invité de mettre pied : Collinet Makosso « le 1er des jeunes. »

Echange en live

Cet échange a fleuret moucheté s’est déroulé en direct sur Télé-Congo ; le direct, a d’intéressant le fait d’être un champ de tous les dérapages. Ce d’autant plus que « notre jeune 1er », C. Makosso, juge et partie, semblait s’amuser de jouer les potaches taquins comme se comportent les trublions dans une cour de récré.

Rompus aux débats publics (notamment sur les réseaux sociaux), Thierry Moungalla, sans se démonter, a eu un motif de satisfaction : sous son mandat, le prix de la communication téléphonique a baissé de « 80%  » au Congo. Résultat : ce sont les Congolais de la diaspora qui bipent pour se faire rappeler du Congo. Il y a peu de temps, c’était l’inverse.

Cerise sur le gâteau, Thierry a conclu par un scoop : à la place de l’intitulé « Postes et télécommunications » dire désormais. « Economie numérique »

En effet, une économie se développe autour des NTIC génératrice d’une foule de prestations à incidence bénéfique utilitaire. Si l’économie a pour définition une amélioration des conditions de vie des populations, dans ce cas la révolution numérique sera une branche d’activités qui fera faire à notre planète un bond de titan dans le système du « mieux vivre » et du « bien-être ». La satisfaction de nombre de besoins prend de plus en plus une allure qu’on aurait considérée comme de la science fiction voici encore une dizaine d’années. Désormais on peut acheter son billet de train sans aller faire la queue en gare, consulter son compte en banque depuis son salon, se faire traiter à distance par un médecin américain alors qu’on est dans un hôpital parisien, grâce à internet.

La métaphore de la maison

Le ministre Moungalla a utilisé la métaphore de la maison pour expliquer la problématique de la fibre optique au Congo. Quand on a bâti une maison, pour avoir l’eau courante et l’électricité il faut se connecter au réseau adéquat (SNDE, SNE). De la même façon, pour que le Congo ait accès à la fibre optique, il faudra d’abord qu’il se branche au réseau international. CQFD. Pour la première phase, la connexion au réseau international, c’est chose faite. Reste le réseau national qui alimenterait le consommateur lambda. Ca demande du temps. T. Moungalla ne dit pas qu’il manque du fric. (Mais alors qu’attend-on pour gagner du temps ? NDLR)

Terminator

La métaphore de la maison est inspirée à Thierry Moungalla Lezin par son prédécesseur à la tribune : Pierre Mabiala, l’homme à la salopette orange. Se définissant lui-même comme « Casseur  » ou « Terminator », Pierre Mabiala, ministre du foncier, a parfaitement joué le renard (ce flatteur décrit par La Fontaine) en attribuant à Sassou le rôle de celui qui nationalisa le domaine foncier au Congo encore sous législation coloniale. Exit Marien Ngouabi qui abolit en son temps la dictature des propriétaires terriens. « Tout pour le peuple » est une banlieue de Brazzaville qui peut témoigner qu’avant Sassou, la guerre de la terre fut déjà déclarée aux chefs Téké de la périphérie de Brazzaville. Ce que « Terminator  » a oublié de dire c’est que c’est, justement Sassou qui se livre à une discrimination du foncier sur fond d’arbitraire ethno-tribal.

Il frappe les faibles, ménage les forts

Regardez ce qui se passe au centre-ville de Brazzaville où le clientélisme du Chemin d’Avenir fonctionne au-delà de la caricature. Voyez comme l’impunité règne à Mpila dans l’ancien site de CFCO où des copains et des coquins de Mpila se sont octroyé des lopins de terre en se fichant du Droit domanial foncier. Enfin « Terminator » , c’est connu, ne frappe que les faibles. Les gros poissons sont épargnés par sa politique de « déguerpissement ». Un citoyen des bas-fonds où «  Casseur  » avait mis en route ses bulldozers lui dit « Quand vous frappez ici, frappez aussi là-bas  ». Mais Mabiala, tout casseur qu’il se définit, tient à son gagne-pain. Il n’est pas fou au point de « déguerpir » les squatteurs de Mpila qui sont sous la protection d’Oloma Niama, Sassou. Sa fougue de casseur/Terminator, il la réserve héroïquement aux faibles.

Les perspectives de la révision de 2016

A quoi a rimé cette conférence de la jeunesse ? Collinet Makosso, également renard, a en tête le fameux "encore non-débat" sur la révision de la Constitution en 2016. Sa position à ce propos n’est un secret pour personne : il veut que Sassou soit Président jusqu’à sa mort ou même au-delà (comme le Dictateur incarné par l’humoriste franco-camerounais Dieudonné), oui Président « outre-tombe ». Quoi de plus opportuniste pour l’ami Collinet non seulement de flatter l’Ego de Sassou au cours de cette conférence mais aussi d’amadouer les jeunes qui, comme chacun sait, constituent, en général le fer de la lance avec laquelle on harponne les tyrans durant les révolutions.

Croc-en-jambe

Certes, ces jeunes du Palais des Congrès, Collinet les a triés sur le volet. Il a fait venir ses collègues ministres en sachant qu’ils allaient prêcher devant des convertis. Aussi personne n’a compris le croc-en-jambe fait à son ami Thierry Moungalla sur le bas débit internet au Congo. Il aurait voulu le jeter à la vindicte publique qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Dieu merci, redoutable dialecticien,, le ministre T. Moungalla ne s’est pas laissé faire. Il l’a du reste fait remarquer dès le début des 15 minutes que Makosso lui avait alloué. Thierry Moungalla maîtrise ses dossiers techniques. Ca se voit. De tous les ministres c’est le seul qui a pu dérouler sa rhétorique sans chercher ses mots ; le seul aussi ayant récolté des applaudissements nourris des jeunes ; enfin le seul sur qui les intervenants suivants (Hellot Mampouya, Emilienne Raoult, Bruno Itoua) se sont appuyés pour étayer leurs speech.

Seul regret : parlant de nouvelles technologies, et du faux panafricanisme de certains partenaires étrangers qui ne recrutent pas de jeunes cadres congolais, il est curieux qu’il n’ait pas cité Vérone Mankou, le « Bill Gate congolais », le premier d’entre eux, technologiquement parlant.

Car gare aux jeunes ! Ils ne sont pas manipulables à souhait. Et même si le casting des présences ne s’est pas fait de façon aléatoire, Collinet n’est pas stupide au point de croire, qu’en dehors du Palais, d’autres paires d’oreilles juvéniles n’ont pas suivi les promesses qu’ils ont faites ce 26 février 2014 en les appuyant sur la personne de Sassou, allégeance oblige.
En 2016, ces jeunes ne vont pas se contenter de belles promesses dans la mesure où Sassou a eu plus de trente ans pour illustrer des « actions concrètes ». En vain !

Des lendemains qui déchantent

Bruno Itoua (ministre de la recherche scientifique et de l’innovation technologique) dans une intervention laborieuse sur l’émergence a eu la latitude d’affirmer l’évidence selon laquelle nombre d’entre eux ne seront pas là pour constater en 2025 le niveau de développement du Congo promis par Sassou. Deux lectures de cette lapalissade sont possibles : soit Sassou ne sera plus dans les parages en 2016, soit les promesses faites au cours de la conférence générale de la jeunesse n’engagent que ceux qui les écoutent et non ceux qui les font. Ce qui revient au même.

On imagine que la séance de questions/réponses avec Bruno Itoua (non retransmise en direct) a permis aux jeunes de montrer qu’ils n’étaient pas dupes. En effet à quoi cela sert-il de leur faire des promesses quand ils voient de leurs propres yeux qu’à l’ère de la révolution du net ils continuent de s’éclairer à la lampe tempête malgré les multiples mandats du patron de Collinet Makosso, en l’occurrence L’homme de L’Alima ?

Simon Mavoula

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