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Le journal Talassa suspendu de parution,

Crime de lèse majesté ?

Réuni en collège des membres, le vendredi 14 décembre 2007, au palais du parlement, à Brazzaville, le Conseil supérieur de la liberté de la communication a rendu coupable le journal Talassa "des violations délibérées et répétées des normes juridiques, professionnelles, éthiques et déontologiques qui régissent l’exercice de la profession de journaliste au Congo Brazzaville "..
Par conséquent, il a décidé de sa suspension, sous toutes ses formes, pour une durée de deux mois. L’annonce de cette sentence a été faite le mardi 18 décembre 2007, en présence de Jacques Banangandzala, président de ladite institution, chargée de réguler la liberté de l’information et de la communication, en République du Congo.

Le censeur Jacques Banangandzala

Le C.s.l.c (Conseil supérieur de la liberté de la communication) "requiert tous officiers et agents de la Force Publique de prêter main forte à l’exécution de la présente délibération", précise la décision.
Le motif qui explique la délibération du conseil est l’article intitulé : "Message sur l’état de la nation : M. Sassou vient de relancer son C.d des mensonges", publié dans ce journal, en page 3, dans sa rubrique "insolite", dans sa parution n°112 du 23 novembre 2007.
Dans cet article, le journal a "qualifié Monsieur Denis Sassou Nguesso de patron de réseaux mafieux". De ce fait, le conseil supérieur de la liberté de la communication a usé de sa faculté d’autosaisine que lui confère la loi organique n°4-2003 du 18 janvier 2003, en son article 4, pour prendre la décision de sanctionner le journal Talassa.
Considérant qu’il ressort de cet article des écrits du genre : "…sur les mêmes promesses qu’il avait faites pendant la période électorale…d’un mensonge à l’autre sinon d’un disque rayé à un C.d usé, voilà qui caractérise les messages d’un chef qui amuse la galerie. Pourtant, le peuple n’est pas dupe", "…l’avenir se chargera de faire le tri entre toutes les magouilles politiques qui lui sont attribuées de restituer tout leur sens aux multiples réseaux mafieux dont il serait patron…".
Pour le conseil supérieur de la liberté de la communication, ces écrits sont diffamatoires et portent atteinte à l’honneur et à la dignité de la personne. "…Au terme de l’analyse de cet article, l’absence des extraits sur les promesses électoralistes ou les mensonges à la base de l’analyse de l’auteur de l’article, pouvant permettre une lecture comparative entre la critique et le contenu réel du message passé au crible de la critique, constitue une faute déontologique manifeste ".
Dans sa délibération, le conseil supérieur de la liberté de la communication a fait savoir qu’il a auditionné, lundi 10 décembre 2007, le directeur de publication du journal Talassa, Monsieur Ghys Fortuné Dombé Bemba. "Au terme de son audition, Monsieur Fortuné Bemba a reconnu que les propos utilisés dans son article sont outrageants, de ce fait non conformes ni aux lois et règlements de la République, ni à la charte des professionnels de l’information et de la communication".

Après la suspension du journal Talassa
Ghys Fortuné Dombé Bemba estime être injustement sanctionné

En tenue décontractée et lunettes de star aux yeux, Ghys Fortuné

Le censuré Ghys Fortuné Dombé Bemba

Dombé Bemba a débuté son point de presse par remercier le Seigneur Jésus-Christ et les collègues qui ont répondu favorablement à son invitation.
Car, Télé-Congo, la chaîne nationale, a refusé d’envoyer une équipe de reportage à son point de presse.
Le conférencier a déclaré avoir suivi, avec déception, la communication faite par le conseil supérieur de la liberté de communication, prononçant la suspension de son journal, Talassa, pour "récidives dans la violation des normes légales, règlementaires et professionnelles en matière d’information et de communication, et aussi pour avoir publié des écrits dans le journal numéro 112 du 23 novembre 2007, qui aurait porté atteinte à l’honneur et à la dignité du président de la République. Pire, le C.s.l.c a, sans scrupule, affirmé que M. Ghys Fortuné Dombé Bemba, au cours de son audition du lundi 10 décembre dernier, a reconnu les propos outrageants utilisés dans son article".
A cette dernière affirmation, le directeur de publication du journal Talassa a apporté un démenti formel, "à moins que le C.s.l.c me brandisse le procès-verbal d’audition signé par moi et reconnaissant de tels propos. En plus, le C.s.l.c qualifie mes écrits de diffamatoires, encore faudrait- il rappeler qu’en matière de diffamation, c’est à la personne diffamée qu’il revient de réagi", a-t-il précisé.

Au regard des faits qui lui sont incriminés, Ghys Fortuné Dombé Bemba a estimé que son journal et lui-même ont été "injustement sanctionnés, puisque dans l’article intitulé : Message sur l’Etat de la Nation : M. Sassou vient de relancer son C.d de mensonges, on me reproche l’absence des extraits sur les promesses électorales ou les mensonges…, alors que j’ai longuement énuméré de multiples promesses réitérées par M. le président de la République, à l’occasion de chaque discours à la nation. A moins que les membres du C.s.l.c soient aveuglés au point de ne pas lire l’article en question", a-t-il déclaré.

A son corps défendant, Ghys Fortuné Dombé Bemba a fait savoir que la ligne éditoriale de son journal n’est pas synonyme de contestation du régime en place, "mais plutôt, l’expression d’une contribution àl’effort de construction, de développement et de transparence dans la gestion des affaires publiques. Ne perdez pas, non plus, à l’esprit l’adage qui dit : Qui aime bien châtie bien. J’aime mon pays, le Congo, j’aime aussi mes frères et mes soeurs du pays", a-t- il dit.
Ainsi, pour le directeur de publication de Talassa, là où quelque chose semble dérailler, il faut bien quelqu’un pour redresser, "de sorte qu’on aille de l’avant, surtout que l’intelligentsia, l’Eglise et autres qui devraient dénoncer le mal, encourager le bien, apporter la soupe, le savon pour parler comme William Booth, ne le font plus au profit de leurs intérêts. Laissons, donc, la primeur à la presse qui représente la voix des sans voix, de dire la vérité sur certaines choses qui ont trait à la vie sociale, économique et culturelle", a-t-il dit.
A la demande du conseil de requérir les officiers et agents de la force publique de prêter main forte à l’exécution de sa délibération, Ghys Fortuné Dombé Bemba a indiqué que "le C.s.l.c a oublié que seul le procureur de la République a le droit de mettre en mouvement l’action publique et donc requérir la force publique : C’est de l’abus et de la confusion totale", a t-il conclu.

Cyr Armel YABBAT-NGO

Ces deux articles nous ont été transmis par un correspondant. Après recherches, ils sont tirés de LA SEMAINE AFRICAINE N° 2754 du Vendredi 21 Décembre 2007

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