On parle de Jébalé et de Falicon, deux cités situées l’une au Cameroun, l’autre en France.
Les deux villes sont jumelées.
La commune de Falicon, perchée sur les hauteurs de Nice dans les Alpes-Maritimes (06), a été ce vendredi 16 mai 2025, le lieu d’une soirée culturelle, haute en couleurs, en l’honneur de Jébalé, village où les racines paternelles de Kylian Mbappé tirent leur sève Sawa depuis des siècles. On parle aussi de peuple Sawa, nom interchangeable des Douala.
Fondation Mbappé
Présidée par Félix Ngambi, un résident camerounais de Falicon auquel le don des table-bancs doit sa concrétisation, La fondation Mbappé va droit au but quand il s’agit d’aider le Cameroun, pays de La CEMAC (Communauté des Etats membres de l’Afrique Centrale).
Reste que le démographe Alfred Sauvy était catégorique : l’aide n’a jamais développé un pays.
Le jumelage des villes, grande illustration du concept d’amitié entre les peuples, symbolise l’unité des peuples alors que, dans l’air du temps , les Nations, rongées par le réflexe xénophobe et l’idéologie sécuritaire, jouent de plus en plus à construire des murs symboliques ou réels, de toute façon des « murs de la honte ». Le jumelage, forme juridique de mariage des cités éloignées dans l’espace, s’emploie de transcender cette inhumanité.
Kin-Brazza
Ne parlons pas du cas caricatural des deux capitales les plus « proches du monde », Brazzaville et Kinshasa, que les autorités avaient, au début des années 2.000, pris l’option de jumeler. La démagogie de l’initiative, comme moyen d’instrumentalisation des peuples riverains , n’avait échappé à personne. Les autorités des deux pays ont toujours objectivement peiné à jeter un pont sur le fleuve Congo, large à certains endroits d’à peine un kilomètre d’une rive à l’autre. Autant dire l’équivalent de 1/30ème du tunnel sous La Manche. Le meilleur jumelage eut été de construire soit un tunnel, soit le fameux viaduc route-rail, vieux rêve datant des années 60. C’est ainsi que se gagnent les matchs de l’intégration économique si chers aux dirigeants d’Afrique. Passons.
La salle de fête
Ce 16 mai , salle des fêtes Elagora, l’équipe municipale de Falicon, commune-village du pays niçois, diapos et films à l’appui, a rendu compte de la coopération socio- culturelle qu’elle a établie avec le village camerounais de Jébalé en pays Douala.
Anaïs Tosel, la maire LR de Falicon, a construit une politique de coopération dans la droite ligne de la dialectique nord/sud que n’aurait pas reniée le grand écolo-agronome René Dumont (cf. L’Afrique noire est mal partie) ou même le bel-oncle André Tosel (1941-2017), professeur de Philosophie à l’Université de Nice Sophia-Antipolis, très en phase avec la critique de l’accumulation du capital fustigée par K. Marx au 19è siècle.
Joignant le geste à la parole, la maire et quelques membres du conseil ont fait le voyage de Jébalé livrer des tables-bancs à l’école du village des ancêtres de Kylian Mbappé. Quel formidable pragmatisme faliconnais dans la problématique universelle de « l’aide au développement » ! Certes en fait de contribution, il s’agit d’une goutte d’eau fraîche dans l’océan de la misère du monde. Toutefois, les images du séjour africain de la maire montrent la joie que le geste des Faliconnais a imprégnée sur le visage des enfants.
Félicitations à la star du foot Kylian Mbappé. L’école, rappelons-le, est l’œuvre de la Fondation éponyme. Honte, en revanche, aux dirigeants africains incapables de répondre aux questions de L’Education Nationale dans leurs pays. Ils se bornent à dribler le peuple par le jeu des détournements financiers ! L’enrichissement personnel, sport national dans ces pays, appauvrit les masses laborieuses.
Las but not the least, Anaïs Tosel a engagé sa commune dans une entreprise de restauration de l’école de Jébalé, aussi bien les façades que l’intérieur des salles de classe. Comment ne pas louer le geste !
Interactions culinaires
En terme d’interculturalité, outre le défilé de mode des enfants de Falicon, coquettes dans en costumes traditionnels locaux alternant avec les tenues Sawa (conçue par Gladys, franco-camerounaise), les invités ont dégusté dans un mélange du genre à la Lévi-Strauss (cf. Le cru et le cuit) , les plats du terroir niçois et des spécialités camerounaises, notamment l’incontournable Ndolé, plat national du Cameroun.
Quand la musique est bonne
Bouquet final, l’orchestre African Connexion composé d’un bassiste Camerounais (Michel Ethée) et d’un guitariste Congolais (G. Bimbou), a agrémenté la manifestation avec le Makossa et la rumba.
Alain Andréa, adjoint à la culture, guitariste dilettante, donnera, après-coup, des impressions (on va dire) d’ordre freudien sur les effets hypnotiques de la musique africaine sur l’inconscient. Il n’a pas tort. Le jeu de basse makossa et les triades de la guitare congolaise constituent un cocktail harmonique explosif. « Ca donne le vertige », avoue Alain, ami d’enfance de Jean-Luc Dana, célèbre accordéoniste niçois.
Alain Andréa est un authentique Faliconnais. Ses ancêtres se sont établis dans le coin depuis cinq siècles ! Certainement à une période où l’imposant massif, le Mont Chauve, donnait le La aux rites religieux du moyen-pays Niçois...
Vernissage
Le photographe Camerounais Alain Ngann et son assistante Cindy ont enrichi la salle avec une série de tableaux. L’iconographie de l’artiste-photographe est connue de IFC (Institut français du Cameroun, ex Centre Culturel Français) . L’artiste a exposé à L’IFC ( Douala) et à l’IFC ( Brazzaville ) où il a fait un master class. De quoi parle son œuvre ? « Mes photos représentent des portraits de vie et des scènes de vie quotidienne en Afrique » explique ce natif de Douala.
Journal sans titre
Ici, à Falicon, les œuvres photographiques sont accrochées sans leurs titres, non par choix méthodologique mais pour des contraintes techniques : « Les titres existent ainsi que l’historique de chaque tableau. Faute de temps, on n’a pas pu assortir les œuvres de leurs légendes » regrette Alain Ngann.
Une photo attire notre regard. Elle représente deux femmes africaines dont l’une structure les cheveux de l’autre en de jolies tresses. Notre inconscient titre la photographie comme étant La tresseuse. Cindy, son agent com. nous fait remarquer que précisément beaucoup de visiteurs l’ont intitulée instinctivement ainsi sans en connaître le titre original. « Toute œuvre a vocation d’être un chef-d’œuvre inconnu que chacun est libre de nommer. » argumente Cindy, un brin balzacienne.