Les exilés politiques du Royaume-Uni au Rwanda : quelle arrogance !

-* Les exilés politiques du Royaume-Unis au Rwanda : quelle arrogance !

Si l’Organisation des Nations-Unies (ONU) ne trouve pas de quoi reprocher au Président du Rwanda, l’Union Africaine (UA), à travers sa panoplie de textes dispose de moyens juridiques pour arrêter l’arrogance de Monsieur Paul Kagamé qui ne fait que surfer sur la vie des Africains et du Peuple rwandais.

Si le Peuple rwandais et la communauté internationale n’ont pas pu l’arrêter pour le crime de génocide ou pour d’autres infractions contre l’humanité, il ne s’agit pas dans ce texte d’inviter à procéder à des actes de coercition physique. Il ne s’agit que d’un appel aux institutions internationales à s’impliquer dans ce dossier brûlant d’avilissement de l’être humain.
Les accords esclavagistes que le Rwanda est en train de multiplier n’engagent pas personnellement le Président Paul Kagamé, mais plutôt le Peuple rwandais tout entier dont l’avenir ne s’arrêtera pas avec la disparition de son président, Monsieur Kagamé.

Hitler, avec sa théorie de la supériorité de la race germanique, est parti et le Peuple allemand n’a pas jusqu’ici cessé de payer les pots cassés de la manipulation qu’il avait malgré lui fini par soutenir. Les Rwandais n’ignorent pas que leur pays a adhéré à des organisations et institutions dont les instruments juridiques doivent avoir un caractère supranational. Ils savent aussi que leur souveraineté étatique ne trouve de limite que par rapport à l’existence des autres Etats. Il leur revient donc, pour contribuer à la noble tâche de sauvegarder la paix dans le monde (mission essentiellement dévolue à l’ONU), de ne pas s’afficher avec des ambitions démesurées pour se mettre à dos les voisins et l’humanité entière.

L’élite dirigeante rwandaise souffre réellement de la méconnaissance de la valeur de dignité humaine. A quoi rime le silence de ce Peuple par rapport aux accords que ses dirigeants ont signés avec le Royaume-Uni à propos de la transhumance des exilés qui n’ont pas expressément choisi leur pays pour s’abriter ? Est-ce une façon de faire comprendre aux autres peuples que le Rwanda peut se permettre de faire ce qu’il veut et qu’il serait suffisamment aguerri pour en subir les conséquences ? « Nous sommes satisfaits que le projet de loi ait été adopté par le Parlement britannique » , « les autorités de Kigali étaient impatientes d’accueillir les personnes relocalisées au Rwanda » , « Nous avons travaillé dur au cours des trente dernières années pour faire du Rwanda un pays sûr et sécurisé tant pour les Rwandais que pour les non-Rwandais » .

Ce sont les déclarations du gouvernement rwandais par la voix de sa porte-parole, Madame Yolande Makolo. C’est un succès diplomatique que le Rwanda revendique et qu’il se permet de savourer au nez et à la barbe des autres Africains. De l’arrogance ou de la stratégie de développement au détriment des autres peuples africains considérés comme étant sans courage et naïfs ? Paul Kagamé est désormais imbu de sa personne. Il a participé à un génocide dont il est sorti impuni et blanchi par les institutions internationales qui n’ont jamais craint de lui dérouler le tapis rouge. En Afrique, il parade d’institutions continentales aux Organisations non gouvernementales (ONG) pour prêcher de concert avec les autres Chefs d’Etats la paix à laquelle il ne donne aucun caractère concret.

Adoubé par ses parrains occidentaux qui trouvent en lui le génie du développement de l’Afrique, il estime qu’au nom de son peuple, le leadership des relations internationales africaines lui est de facto échu. Comment les Présidents d’autres Etats africains n’arrivent-ils pas à le convaincre que l’économie du continent reste un sort lié et une cause commune nécessitant une réflexion globale ? Paul Kagamé peut-il donner l’exemple d’un pays qui a connu l’expansion économique en méprisant ses voisins immédiats ? Tous les pays dits développés n’augmentent leur capacité économique que par le biais des accords communautaires.

Le Rwanda fait partie de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC), de la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL), de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), de l’Union Africaine (UE) etc. Si ses partenaires économiques les plus fiables ne doivent être que ceux qui sont à mille lieues de ses frontières (à savoir les pays occidentaux), il serait temps que l’Union Africaine se réajuste et considère Paul Kagamé comme la brebis galeuse du progrès concerté en Afrique. En effet, l’Occident a intérêt à se repositionner en Afrique, continent convoité par les nouvelles puissances économiques du monde. Mais, il n’est pas de bon aloi qu’il applique la politique qui consiste à dresser les peuples les uns contre les autres.

Néo-exilés

L’argent que Paul Kagamé a reçu pour construire ses centres de relocalisation des exilés s’apparente aux pièces de monnaie remises à Judas pour son fameux baiser. Tant n’est pas le financement réalisé par le Royaume-Uni pour la mise en place des infrastructures d’accueil au Rwanda qui titillent les esprits, mais ce sont les problèmes socio-économiques (qui financièrement s’annoncent inquantifiables à long terme) auxquels s’exposent les Rwandais, qui doivent interpeller la solidarité régionale. Le Rwanda engage égoïstement les institutions publiques africaines à prendre en charge un fléau d’émigration pour lequel l’Europe ne se sentira plus concerné. Déjà que l’émigration économique des Africains vers l’Europe fait des populations la risée de la scène internationale, le ridicule sera incommensurable lorsque ces mêmes Africains, toujours en proie à des difficultés financières, devront, une fois de plus, se retourner vers les parrains européens pour demander de l’aide nécessaire à la survie des « néo exilés » du Rwanda.

La déportation des citoyens étrangers au Rwanda n’est plus une fiction. Il devient un lourd tribut dont aucun Africain ne pourra aisément se défaire. Paul Kagamé manque de considération à l’égard de ses pairs africains et il estime qu’en dehors des Rwandais, les autres peuples africains ne valent rien.* L’indifférence de la Commission Africaine des Droits de l’Homme face au crime d’esclavage moderne orchestré par le Rwanda. Il est certes illégal, voire subversif, d’arguer que Paul Kagamé doit disparaître de la scène politique africaine, mais il n’en demeure pas moins vrai que les Rwandais doivent faire lecture de leur Constitution pour prouver à leur Président qu’il viole, sans leur consentement, les principes fondamentaux du Droit international auxquels leur pays a adhéré. Leur président est une menace à la souveraineté territoriale du Rwanda. Si, au nom de sa souveraineté politique, le Rwanda peut conclure des accords internationaux qui l’arrangent et qui le concernent individuellement, cela ne lui donne pas l’occasion de déroger aux principes généraux universellement admis. En signant le 11 novembre 1981 la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Droits des Peuples (CADHDP), ce pays a reconnu que « la liberté, l’égalité, la justice et la dignité sont des objectifs essentiels à la réalisation des aspirations légitimes des peuples africains  ».

De quelle dignité veut témoigner Paul Kagamé vis-à-vis de ses pairs africains quand il veut importer sur le continent une catégorie de personnes qui n’a aucun projet de développement économique ? Avant de conclure ses accords avec le Royaume-Uni (Loi « Safety of Rwanda (Asylum and Immigration) » (sûreté du Rwanda, asile et immigration) et le traité de partenariat entre le Royaume-Uni et le Rwanda en matière d’asile), Le Rwanda aurait dû préalablement, ne fût-ce que par décence, informer les institutions africaines de ce projet de portée internationale et continentale non négligeable. L’arrogance du Rwanda à vouloir considérer que, pour son développement économique, les autres Etats africains doivent s’aligner derrière ses pratiques d’agression, constitue une violation flagrante de la CADHDP.

Négrier

Cette charte réaffirme l’engagement des Etats « d’éliminer sous toutes ses formes le colonialisme de l’Afrique, de coordonner et d’intensifier leur coopération et leurs efforts pour offrir de meilleures conditions d’existence aux peuples d’Afrique, de favoriser la coopération internationale en tenant dûment compte de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme » . S’emparer des problèmes des Anglais pour venir leur donner des solutions concrètes au Rwanda, ce n’est que faire preuve de colonialisme ou de recolonisation du continent. Le Rwanda entend s’ériger en nouveau propriétaire des « exilés et des émigrés » pour qui il désire définir un dessein à sa guise. Des êtres humains qui ne peuvent que lui obéir par défaut de choix. Le Rwanda ne devient-il pas un pays négrier ?

L’article 45 de la CADHDP assigne à la Commission Africaine des Droits de l’Homme les missions de « Rassembler de la documentation, faire des études et des recherches sur les problèmes africains dans le domaine des droits de l’homme et des peuples, organiser des séminaires, des colloques et des conférences, diffuser des informations, encourager les organismes nationaux et locaux s’occupant des droits de l’homme et des peuples et, le cas échéant, donner des avis ou faire des recommandations aux gouvernements (...)Formuler et élaborer, en vue de servir de base à l’adoption de textes législatifs par les gouvernements africains, des principes et règles qui permettent de résoudre les problèmes juridiques relatifs à la jouissance des droits de l’homme et des peuples et des libertés fondamentales (...) Coopérer avec les autres institutions africaines ou internationales qui s’intéressent à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des peuples » . Dans le cas d’espèce, cette disposition n’a point connu d’application. Il n’y a aucune preuve que l’une ou l’autre des missions avant-gardistes des Droits des Peuples africains ait été réalisée. Une décision commune de politique générale africaine aurait pu peser sur les débats et amendements longuement discutés au sein du Parlement britannique. En effet, la Cour suprême britannique, qui a eu à émettre des avis à propos desdits accords, s’est suffisamment inquiétée sur les nombreuses atteintes aux Droits de l’Homme auxquelles risquent d’être exposés les refoulés du Royaume-Uni. Pourquoi le durcissement de la politique migratoire britannique doit-elle avoir des répercussions en Afrique ? C’est la question à laquelle doit répondre la Commission Africaine des Droits de l’Homme qui devrait se préserver de l’humiliation permanente dont souffre la diplomatie africaine. A la lecture de l’article 46 de la CADHDP, il ressort que cette institution dispose d’un important pouvoir d’investigation susceptible de l’emmener à entendre toute personne, voire le Secrétaire Général de l’UA. Jusque là, rien n’a été entrepris pour instruire un dossier sur ces faits de nature attentatoire aux libertés fondamentales de l’Homme. Aucun Africain ne saura admettre que la Commission n’ait pas été au courant de ce qui se tramait entre le Rwanda et le Royaume-Uni. « Qui ne dit mot, consent » affirme l’adage populaire. La Commission pour se laver de son laisser-faire a encore la possibilité de signaler, en vertu de l’article 58 de la même charte, l’illégalité desdits accords auprès de la Conférence des Chefs d’Etats.

La Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples peut également en être saisie sur le fondement des articles 2 et 3 du protocole portant création de la Cour signé en juin 1998.Ayant une importante interaction avec la Commission, la Cour, chargée de la protection des Droits de l’Homme et des peuples africains, a pour principale compétence de connaître des affaires relatives à l’interprétation et à l’application de la CADHDP. Maintenant que les accords querellés peuvent être exécutés, le Rwanda devrait être questionné sur les actes répréhensibles qu’il a accepté de commettre sur le sol africain. Mais, en rapport à l’arrogance de son Président, il y a fort à parier qu’il ignorera toute convocation et procédure pouvant lui être notifiées.

Cette attitude arrogante a déjà été constatée par la Cour Africaine des Droits de l’Homme dans l’Affaire qui oppose la République Démocratique du Congo (RDC) au Rwanda (voir Ordonnance du 7 mars 2024, Requête n° 007/2023). Dans cette espèce, le Rwanda, qui avait reçu tous les éléments de la procédure, n’a ni répondu aux reproches qui lui sont faits ni daigné se représenter devant la Cour. La République du Rwanda a été déclarée “Non représentée”.Ce ne sera que, par le biais des pressions juridiques qui pourront conduire à l’isolement diplomatique et territorial, le Rwanda saura se rendre compte que pays enclavé, il lui faudra respecter le principe de bon voisinage ainsi que les accords qui le lient aux pays limitrophes.

* L’Union Africaine (UA) en manque d’initiatives face à l’arrogance du Rwanda

Pour sanctionner l’arrogance de Paul Kagamé, il n’y a pas de bonnes solutions à tirer dans l’Acte constitutif de l’UA du 11 juillet 2000. Conçue pour être un regroupement politique, cette institution ne manifeste pas de pugnacité pour porter et défendre les enjeux politiques et économiques communs aux Africains. Son acte fondateur équivaut beaucoup plus à des voeux pieux dont, en réalité, les Chefs d’Etats peuvent se passer. Les Chefs d’Etats baignent dans une sorte d’impunité sournoisement admise sur la scène continentale.Conscients d’avoir promu des objectifs économiques, des principes de solidarité, de paix, de défense de la sécurité des Etats et du respect des Droits de l’Homme et des Peuples (article 2), les Chefs d’Etats africains n’ont pas voulu donner à l’UA une carrure d’instrument politique incontournable pour le développement démocratique et économique du continent. C’est une institution sans charisme, susceptible d’être manipulée par des personnalités à fort caractère comme le sulfureux Paul Kagamé. Comme par hasard, c’est effectivement sous sa présidence à la tête de l’union que les accords entre le Royaume-Uni et le Rwanda pour l’accueil des exilés ont été signés, et sans aucune réaction ou protestation de la part des Etats membres. Au niveau de l’UA, la sanction que l’on peut envisager à l’encontre du Rwanda, violeur des Droits de l’Homme et des Peuples et potentiel esclavagiste, peut découler de l’article 23 de l’Acte constitutif sus-évoqué. Il s’agit de l’unique disposition du texte qui prévoit deux catégories de sanctions : la première, en cas de non paiement des cotisations et la deuxième, qui correspond au cas du Peuple rwandais, est ainsi libellé 2. « En outre, tout Etat membre qui ne se conformerait pas aux décisions et politiques de l’Union peut être frappé de sanctions notamment en matière de liens avec les autres Etats membres dans le domaine des transports et communications, et de toute autre mesure déterminée par la Conférence dans les domaines politique et économique ». Pour la circonstance, qui oserait proposer un embargo aérien ou économique contre le Rwanda ? L’UA reste une institution timorée. Il faudra peut-être attendre les réactions des présidents africains nouvellement arrivés sur la scène africaine. Mais, à la seule condition que ceux-ci viennent à considérer que l’intérêt de tous les peuples africains serait de se doter d’une vision concrète et commune en vue de la gouvernance des politiques industrielles des Etats membres.* Le Secrétariat Général des Nations-Unies entre le doute et le « ne rien faire »

L’ONU reste, par excellence, la structure dotée de tous les moyens juridiques et de pression pouvant conduire à la remise en cause des accords sur les exilés conclus entre le Royaume-Uni et le Rwanda. Ces Etats violent les principes généraux de Droit international relatifs au respect de la dignité de l’espèce humaine. Cette exploitation hasardeuse des textes internationaux ne se passe pas à l’insu du Secrétariat Général de l’ONU. Mais, malgré tous les rapports rédigés essentiellement par les ONG et toutes les communications de presse, l’organe chargé de garantir la paix et la sécurité dans le monde ne pérore que sur des considérations politiques. Il feint d’esquiver la réalité des expulsions que le Royaume-Uni tente de réaliser dans l’indifférence des cris et des pleurs des personnes à « relocaliser » .

La Loi « Safety of Rwanda (Asylum and Immigration) » (sûreté du Rwanda, asile et immigration) du 23avril 2024 et le traité de partenariat entre le Royaume-Uni et le Rwanda en matière d’asile d’avril 2022 vont à l’encontre du principe de la souveraineté des Etats. Le Rwanda ne justifie que d’un seul intérêt pour accueillir sur son sol les émigrés d’autres pays du monde. C’est celui de recevoir de la part du Royaume-Uni des aides financières. En d’autres termes, le Rwanda aliène, d’une part, sa souveraineté politique au profit du Royaume-Uni qui pourrait désormais intervenir dans sa politique intérieure, dès lors que ses exilés politiques seraient en précarité sur le sol africain. D’autre part, le Peuple rwandais se trouve enfermé dans un système économique qui le contraint à rendre régulièrement compte au Royaume-Uni sur les situations concrètes d’insertion de ces personnes
protégées par la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le Droit d’asile. Jusqu’à preuve du contraire, aucun Etat au monde (sauf dans le cadre des accords de Dublin et de la politique européenne de gestion des flux migratoires) n’est tenu de se soumettre à la volonté d’un autre Etat pour gérer, sous sa dépendance, des individus appartenant à un Etat-tiers. La traite des êtres humains se trouve caractérisé : un pays moyennant finance reçoit des individus et l’autre dispose d’un droit de contrôle sur l’avenir des individus. C’est ce que la Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage signée à Genève, le 7 septembre 1956 prohibe en ces termes :

Article 1er : “Chacun des Etats parties à la présente Convention prendra toutes les mesures, législatives et autres, qui seront réalisables et nécessaires pour obtenir progressivement et aussitôt que possible l’abolition complète ou l’abandon des institutions et pratiques suivantes, là où elles subsistent encore, qu’elles rentrent ou non dans la définition de l’esclavage qui figure à l’article premier de la Convention relative à l’esclavage signée à Genève le 25 septembre 1926 :
« a) La servitude pour dettes, c’est-à-dire l’état ou la condition résultant du fait qu’un débiteur s’est engagé à fournir en garantie d’une dette ses services personnels ou ceux de quelqu’un sur lequel il a autorité, si la valeur équitable de ces services n’est pas affectée à la liquidation de la dette ou si la durée de ces services n’est pas limitée ni leur caractère défini (...) » . C’est dans cette situation que se trouve le Royaume-Uni vis-à-vis du Rwanda qui se lie financièrement à lui au nom des migrants. L’accord sur l’expulsion des exilés vers le Rwanda place, sans limitation de durée, ce pays sous une dépendance financière en lien avec le service rendu pour l’accueil des étrangers. Dans cette relation, les engagements respectifs demeurent disproportionnés et qui créent une grande dépendance financière. Habituellement, ce type de relations ne pouvait que découler d’un accord multilatéral incluant aussi les pays d’origine des personnes en transhumance. Le Rwanda s’est, de ce fait, substitué à la compétence matérielle des organismes onusiens sans en avoir obtenu un mandat express.Au niveau de l’ONU, les critiques sur ces accords portent surtout sur l’aspect du partenariat déséquilibré parce que le Rwanda n’a pas une longue tradition en matière d’asile. Or, au delà de tout ce qui concerne l’être humain personnellement, le problème de ces deux accords devrait être celui de ces êtres humains susceptibles de se déplacer aussi dans l’espace africain et non seulement sur le seul sol rwandais. Les migrations ont toujours un commencement et elles ne s’arrêtent guère. Les pays voisins du Rwanda n’ont jamais prévu de se confronter à ce type de migrants. Ils n’ont pas non plus été sollicités pour se prêter à d’éventuels accueils intra muros. Qu’est-ce qui garantit que les déportés vont se limiter au seul territoire du Rwanda ? Parmi les libertés fondamentales de l’Homme, nombreuses seront certainement violées par les dirigeants rwandais. Il faut penser notamment au fait qu’aucun État au monde ne peut obliger un individu à travailler dans une région qu’il n’a pas librement choisie. La cécité continuelle des organes de l’ONU, lorsqu’il s’agit d’intervenir d’urgence pour arrêter des atteintes commises envers les populations africaines, n’est pas de nature à faire croire que cette nouvelle forme de « traite négrière » sera rapidement inscrite et prohibée selon l’agenda du Conseil de Sécurité. Il ne s’agit que de l’Afrique, Continent de tous les maux et souvent l’objet d’aveuglement !D’ailleurs, pour ne pas extrapoler, on peut noter que la communauté internationale ne cesse de louer les efforts économiques du Rwanda, sachant que son embellie économique se repose, pour une grande partie sur des massacres que subissent d’innocents et paisibles citoyens de la RDC. Devant de pareilles évidences, doit-on s’attendre à une solution fiable de la part de l’ONU ? Pourtant, il est écrit à l’article 6 de la Charte des Nations-Unies : « Si un Membre de l’Organisation enfreint de manière persistante les principes énoncés dans la présente Charte, il peut être exclu de l’Organisation par l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité ».

Voilà la sanction la plus efficace pour arrêter l’arrogance des autorités rwandaises qui agissent sans consultation de leur peuple. Ils ne sont pas nombreux ces Rwandais qui accepteraient d’évoluer en dehors des instances internationales. La coopération bilatérale à laquelle peut se livrer le Rwanda présente des limites qui peuvent le contraindre à l’autarcie. Mais, une telle approche punitive reste loin d’être envisagée car la real politik invite à être modéré lors de la prise des décisions. Enfin, sur la scène internationale, cette transhumance paraît être sous-estimée, en faisant penser que cela ne concerne qu’une simple situation de demande d’asile. Or, la réalité est que lorsque l’asile est refusée à un individu, celui-ci continue d’éprouver des peurs en cas de retour vers son pays d’origine. Alors, l’Afrique se retrouvera avec des apatrides à qui il faudra donner du travail et une nouvelle identité. Quelles sont les conditions préconisées à cet effet ? On ne peut donc pas faire fi de la situation d’esclavage qui attend les éventuels déportés au Rwanda.

L’ONU a grand intérêt à faire application de l’article 3 alinéa 1. de la Convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage signée à Genève, le 7 septembre 1956 qui édicte : “Le fait de transporter ou de tenter de transporter des esclaves d’un pays à un autre par un moyen de transport quelconque ou le fait d’être complice de ces actes constituera une infraction pénale au regard de la loi des Etats parties à la Convention et les personnes reconnues coupables d’une telle infraction seront passibles de peines très rigoureuses”. Les vagues d’expulsion vers le Rwanda peuvent être interrompues sur ce fondement juridique. Paul Kagamé ne serait-il pas à traduire devant les juridictions internationales pour des faits d’organisation et de participation à la traite des êtres humains ?* L’Union européenne (UE) et le début d’une recolonisation de l’AfriqueL’échec de la politique de gestion des flux migratoires en Europe a toujours tendance à jeter en pâture les Africains qui demeurent les mal défendus ou insuffisamment protégés.

Pourtant, les accords de Dublin établissent nettement que les demandes d’asile doivent être examinées dans le premier pays européen par lequel le requérant a transité. Ceux qui émigrent vers la Grande Bretagne ne justifient souvent pas des demandes d’asile rejetées dans les pays d’entrée dans l’espace Schengen.De façon coutumière, les populations africaines émigrent pour rester en Europe continentale et le Royaume-Uni fait surtout face à l’émigration d’origine d’Europe de l’est, du Moyen-orient et des pays d’Asie (voir les rapports et statistiques d’Eurostat). L’Europe paraît ainsi bien nantie pour mieux comprendre la problématique des migrations en Afrique. Pourquoi ne s’est-elle donc pas organiser pour éviter de dépayser les exilés au Rwanda ? En effet, les pays européens disposent des superficies et de moyens matériels plus importants que le Rwanda. Ce qui peut leur permettre de mieux gérer ce fléau sans chercher à aggraver les problèmes économiques en Afrique.Les accords internationaux restent clairs sur le fait que les émigrés doivent être pris en charge dans les pays d’accueil. Renvoyer ceux-ci vers le Rwanda atteste de ce qu’une possibilité ou une stratégie de repeuplement artificiel de l’Afrique vient d’être initiée. Le vrai problème que tente de gérer le Royaume-Uni et, par ricochet, l’Union européenne (UE) n’est pas d’apporter une solution à la porosité des centres d’hébergement des exilés politiques, mais plutôt celui de juguler la frénésie des attentes des étrangers par rapport à l’Europe. Il faut dissuader notamment les Africains de quitter leurs pays qui risquent par la suite d’être occupés de nouveaux colons, en l’occurrence des apatrides financièrement plus cossus. Exceptés les 3.500 euros alloués à tout exilé en partance au Rwanda, les mêmes exilés s’attendent à recevoir des aides multiformes tant de la part de la solidarité internationale que de l’Etat rwandais qui a le devoir de garantir leur dignité. Alors, à quoi correspondra le niveau de vie de ces “éventuels africains” par rapport à celui des Rwandais autochtones ? Le rapport de la Banque mondiale mis à jour le 28 septembre 2023 fixe l’indice du capital humain (IHM) du Rwanda à 0,38, légèrement supérieur à la moyenne des pays à faible revenu, mais inférieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne. En moyenne, le salaire mensuel d’un Rwandais étant de 242 euros (selon les statistiques de 2024), il lui faudra plus de 14 mois de revenus pour prétendre égaler le niveau de vie de l’exilé qu’il est censé accueillir chez lui. Situation aberrante qui conduit à se méfier des intentions de l’UE et des non-dits des politiques économiques à réintroduire en Afrique subsaharienne.

En effet, il ne faut pas perdre de vue que le Rwanda, qui a adhéré au Commonwealth en novembre 2009, donne à la diplomatie européenne l’occasion de pouvoir s’abriter derrière des accords spécifiques en vue de déployer, à son tour, de grandes vagues d’expulsions des émigrés. Les vols charters décriés dans les années1990 pourront revenir sans complexe. Quelle a été l’attitude de l’UE par rapport à l’accord signé entre Israël et le Rwanda en 2018 pour la relocalisation des réfugiés est-africains expulsés d’Israël ? Le silence complaisant ! Le Rwanda avait perçu ses financements dans le cadre dudit accord et ne peut donc pas se refuser de réitérer l’expérience.La traite transatlantique et la colonisation ont été imposées aux Africains. Avec le Droit international qui fait des Africains des détenteurs de droits, l’asservissement ne peut plus prendre les formes d’antan. Ce n’est que par l’intermédiaire des personnalités comme Paul Kagamé que l’Europe peut aisément reconquérir le continent africain qui se distingue désormais par la diversification des rapports économiques avec d’autres continents.

Rocil MATINGOU Avocat au Barreau de Paris
Consultant juridique et Intermédiaire en affaires