Ancien cadre de CFCO (Chemin de fer Congo-Océan), Isidore Mvouba, 61 ans (ou 56ans), élu de Kindamba(le Pool), est ministre d’Etat, coordonnateur du pôle des infrastructures de base, ministre des Transports, de l’Aviation civile et de la marine marchande. Il est en outre secrétaire général par intérim du PCT (Parti congolais du travail), depuis la disparition d’Ambroise Noumazalaye. Mais le PCT est dans le coma, et d’aucuns accusent Isidore Mvouba de l’assommer davantage.
S’il est une conviction que l’on ne peut dénier à Isidore Mvouba, c’est celle de rester fidèle à Denis Sassou Nguesso, et donc au PCT. Un souvenir : en 1992, dans le premier gouvernement de Pascal Lissouba, fraîchement nommé ministre du Commerce, Isidore Mvouba arriva en retard au premier Conseil des ministres. L’avait-il fait exprès pour défier le nouveau pouvoir qui n’avait pas respecté sa parole donnée entre les deux tours, à savoir accorder cinq ministères au PCT ? En tout cas, l’attitude de Mvouba, prise pour un manque d’intérêt de la politique, révolta Moungounga Nguila. Isidore Mvouba fut démis de ses fonctions.
Aujourd’hui, dans les coulisses des palais, plusieurs cadres et militants du PCT reprochent au ministre d’Etat de manquer d’intérêt pour le parti qu’il dirige. Pas de ligne politique ni de vision, le PCT version Isidore Mvouba est sous respiration artificielle, faute d’être animé et impulsé. Le dernier Congrès n’aurait pas eu lieu, boudé par les cadres. Si les élections législatives avaient été transparentes au Congo, le PCT n’aurait aucun élu. "Il faut avouer que le PCT est très malade, depuis la disparition d’Ambroise Noumazalaye. Le secrétaire général par intérim rêve sans le dire du leadership, le moment venu, mais a-t-il la capacité de diriger un parti politique ? » se demande un ancien ministre sous couvert d’anonymat. Un élu du PCT, et pas des moindres, est plus sévère encore : "A la Primature, du moins dans ses fonctions de coordonateur de l’action du gouvernement, il n’a pas joué de rôle majeur. Cela explique aussi la rareté des Conseils de ministres sous le précédent gouvernement", analyse-t-il. Et d’ajouter : "Mvouba se targue d’être le chef de la majorité. L’est-il réellement ? Son incapacité à faire jouer la cheville ouvrière du PCT est insupportable. » Cet élu va vite en besogne. Il est de mauvaise foi en parlant des ouvriers : au Congo, tout le monde est chômeur, sauf les hommes politiques. Toutefois, ce poids lourd du parti déplore la mort des sections et des cellules. Et, sans plonger dans un cours de Science politique, il ajoute : " Partout où existent les partis politiques, les fonctions sont les mêmes : "les partis servent à "donner aux citoyens des points de repères ; les partis clarifient les choix électoraux ; les partis exercent un certain contrôle préventif des gouvernants, etc", cela, Mvouba l’ignore." Dans le microcosme médiatico-politique de Brazzaville, les surnoms à l’encontre d’Isidore Mvouba pullulent : assistant du Chef de l’Etat, premier des ministres fantômes, collaborateur au cabinet de Mpila, l’homme des petites réunions et des associations…
Un homme d’associations
Jamais un homme n’aime autant les associations que le ministre d’Etat, coordonateur du pôle des infrastructures de base : association Mama Isidore Mvouba, association Cap sud, association des Sapélogues, association les Amis de Sassou Nguesso, etc. En France, dans la Seine et Marne, il a été à l’origine d’une association mort-née. En réalité, comme le souligne un politologue, Guy Oko, les associations permettent à Isidore Mvouba de montrer à ses rivaux ou au Président de la République sa capacité de mobilisation, lors des événements tels les défilés. "Les membres de ces associations viennent en masse, par exemple pendant les défilés du 15 août. Les militants du parti, eux, sont oubliés, voire méprisés. En fait, le PCT n’existe plus", observe-t-il. Un autre ancien député déplore l’intérêt qu’éprouve Mvouba pour les futilités, comme la Sapélogie :"C’est l’acte le plus bas auquel un homme politique puisse s’adonner. Mvouba banalise la politique », tranche-t-il. (Par ailleurs, ajoute-t-il, « les Sapélogues dévoient la Sape, la vraie, l’élégance ». Sans doute ce député masqué dégaine-t-il aussi contre l’autre « sapélogue » Alain Akouala, mais il ne précise pas ce qu’il entend par la vraie « Sape ».)
Un vieux militant pense que le secrétaire général par intérim se préoccupe plus de l’opinion que se fait le Chef de l’Etat de lui. Isidore Mvouba s’est inscrit à l’école de l’amour-propre – « le dédoublement réflexif par quoi je me préoccupe de l’opinion que les autres ont de moi… » (JJ Rousseau)
Isidore Mvouba a occupé les fonctions les plus importantes dont puisse rêver tout homme politique. Il aurait pu forcer le respect, être le dauphin potentiel de celui qui domine le Congo. En vain. Mais peut-être ne lui a-t-on pas donné les moyens de s’exprimer ou de prendre de la hauteur ! Peut-être n’est-il simplement que le reflet des turpitudes qui ont toujours défini le PCT ! Dans ce cas, il eût été mieux qu’il renonçât à la politique… Ne pas dire ce que l’on pense est le pire des supplices. Mvouba Isidore dort. Bonne nuit monsieur le ministre !
Bedel Baouna