Brazzaville : visite de l’Emir du Qatar dans une ville sans lumières

"L’aéroport de Maya-Maya à l’ombre de la SNE (société nationale d’électricité)" n’aurait pas été un mauvais titre pour illustrer la série noire qui frappe le Congo-Brazzaville en matière d’électricité.

En visite au Congo-Brazzaville ce dimanche 28 mars 2010, l’émir du Qatar, Sheikh Hamad Khalifa Al-Thani. a dû se faire beaucoup de lumière dans l’esprit pour voir clair dans la foule d’accords de coopération que les deux états ont envisagé de signer. Accueilli par son homologue congolais à 19 h (heure de Brazzaville) c’est sur un tarmac quasiment plongé dans les ténèbres que l’émir moyen-oriental a goûté au protocole congolais.

La récurrence du problème d’électricité a visiblement cessé d’embarrasser le Président congolais tant, dans cette aérogare crépusculaire, il s’y sentait comme un poisson dans l’eau. Il peut néanmoins rendre grâce aux nombreux flashes de photographes et aux projecteurs de Télé-Congo qui ont compensé le manque crucial de lumière à l’aéroport international de Maya-Maya. En revanche, il a fallu beaucoup d’imagination aux malheureux téléspectateurs de Télé-Congo pour distinguer dans la pénombre les acteurs de cette cérémonie officielle pourtant, selon Congosite, prévue de longue date « en marge du sommet des Nations Unies sur le financement du développement en 2008 à Doha (Qatar). »

Poisson d’avril ?

Malgré cette marge, le Congo a une fois de plus donné une piètre image de lui-même du point de vue de ses infrastructures urbaines et, notamment du mobilier luminaire. A la décharge du monarque congolais, la fonctionnalité du barrage d’Imbouilou sur la léfini, a-t-il prévu, ne sera effective qu’à compter du 1er avril 2010 soit (au moment où nous publions cet article) dans deux jours. Autant dire que l’Emir du Qatar n’a pas de pot pour être arrivé à Brazzaville plus tôt que la lumineuse date annoncée par son homologue congolais. Il a eu tort si, bien sûr, cette date, ne correspond pas à un poisson d’avril. En effet comme l’Arlésienne de Daudet, voilà des lustres qu’on parle des effets de ce fameux barrage sans que personne n’en voit la couleur. Comment cela pourrait-il en être autrement si, notamment, selon certaines critiques, l’entreprise chinoise chargée de livrer "clef en main" cette usine hydroélectrique n’en avait jamais construite auparavant. Autant dire que les conditions dans lesquelles a été signé ce contrat nous plongent (pour reprendre Balzac) dans une véritable ténébreuse affaire.

Pour l’instant les Congolais continuent à gérer leur quotidien en s’éclairant soit à la lampe tempête soit à l’aide de groupes électrogènes made in…China, ajoutant ainsi à la pollution sonore et atmosphérique de nos villes.

Ce dimanche 28 mars 2010, les groupes folkloriques composant le comité d’accueil à Maya-Maya donnaient à la cérémonie officielle un je ne sais quoi de sauvage qui renvoyait aux messes noires sur fond de bal poussière. Si Sassou voulait renforcer dans l’esprit de son invité arabe le cliché d’une Afrique rétrograde, il a magnifiquement réussi son coup.