Edouard Ambroise Noumazalaye, 72 printemps, pionnier politique au Congo a tutoyé les cimes du pouvoir. Après avoir été plusieurs fois ministre le voici aujourd’hui président du sénat et premier secrétaire du Parti Congolais de Travail (PCT). Le PCT a fait son quantum de vie dit-il. D’actualité il œuvre à la refondation du paysage politique du Congo, en puisant sur les erreurs de la vielle classe politique. C’est le « Jupé » de Sassou, qui tente de constituer la grande vague politique pour les batailles électorales futures : L’UMP version congolaise, au sein de laquelle devront se retrouver d’autres partis politiques.
A SUECO, au cours d’un discours "castrien" de plus de quatre heures, prononcé à l’occasion d’une conférence-débat, organisée par le Cercle de Réflexion Proposition et Initiative (CRPI), ce tyranosaure de la politique congolaise, en Voyageur Représentant Placier (VRP) de la "Nouvelle Espérance" a tenté de vendre à l’élite politique de Pointe-Noire, et des centaines de participants, son idée du futur grand parti politique du Congo, une idée à laquelle le président Denis Sassou Nguesso attacherait du prix.
« ... Je voudrais tout d’abord présenter mes sincères remerciements au Cercle de Réflexion Proposition et Initiative (CRPI), ainsi qu’à son président, le député Claude Milandou Abraham pour l’occasion qui m’est donnée d’échanger avec vous sur un thème qui est d’actualité et de haute portée nationale, à savoir « La refondation de la vie politique au Congo, vision du PCT. »
Je m’en vais aussi saisir cette opportunité pour rendre hommage à l’heureuse initiative que vous avez eu mesdames, et messieurs les membres du CRPI de créer à travers votre organisation un espace de débat citoyen. Le pays en a besoin, la démocratie également.
L’approfondissement de la démocratie, la moralisation de la vie publique nécessite, en effet ce genre d’entreprise d’où la pédagogie du savoir, du savoir faire et du faire savoir doit faire reculer l’ignorance et la médiocrité tout en développant une nouvelle citoyenneté au service des valeurs auxquelles nous aspirons tous : L’unité, la solidarité, la concorde, le progrès, la justice et l’équité.
Cela étant dit, s’agissant du thème que j’ai le plaisir de voir et de débattre avec vous mon exposé introductif va tenter d’explorer les axes ci-après ;
– La refondation politique au Congo sous le monopartisme ;
– La refondation politique sous l’ère du multipartisme ;
– Pourquoi le PCT doit il approfondir sa refondation aujourd’hui ;
– Refonder le PCT est-ce trahir la mémoire du président Marien Ngouabi.
Comme partout dans le monde, l’histoire de la vie politique congolaise se confond avec celle de la lutte des partis politiques pour la conquête du pouvoir.
En effet, dès le début des années quarante,
– le Rassemblement du Peuple Français (RPF), de Yassen Samba Dellot, en 1940 ;
– Le Parti Progressiste Congolais (PPC), de Félix Tchicaya en 1945 ;
– Le Mouvement Socialisme Africain (MSA), de Jacques Opangot en 1946 ;
– Et, l’Union Démocratique pour la Défense des Intérêts Africains (UDDIA), de l’Abbé Fulbert Youlou, en 1956
rythment la marche progressive du Congo vers l’indépendance dans le cadre du multipartisme naissant.
C’était bien avant la création en février 1964, du Mouvement National de la Révolution (MNR), qui a inauguré la tradition monopartiste avec le président Alphonse Massambat Débat.
Mais c’est au PCT, succédant au MNR, que revient le mérite d’avoir profondément marqué la mémoire collective des congolais. Le MNR, sitôt crée devint très vite le théâtre d’affrontements idéologiques entre les trois écoles éthiciennes du socialisme au Congo.
Les tenants d’un socialisme gauchiste sont pris sur le réel social congolais. Un socialisme éthique, prétendument Bantou et puis un socialisme scientifique comme option interne. Cette dernière école qui connaît la nécessité d’une étape transitoire, celle de la révolution nationale démocratique populaire, afin de développer tant le niveau de conscience politique du peuple que celui des forces productives, acquiert l’adhésion du camarade Marien Ngouabi alors délégué politique de l’Armée Populaire Nationale (APN), au sein du comité central du MNR. La confusion idéologique consécutive à la confrontation conduisit à l’effondrement du MNR.
Marien Ngouabi, qui venait de succéder au président Massamba Débat, créa le Conseil National de Révolution (CNR), tout en restant à l’écart du pouvoir d’Etat. Mais vu l’évolution de la situation, il fut contraint de prendre le contrôle de l’appareil de l’Etat, et de faire le choix du réajustement de la révolution. Cela veut dire faire la première refondation du Parti-Etat, en vue de la relance du mouvement citoyen de 1963 qui commençait à manquer cruellement de perspective.
Marien Ngouabi soutenu par les hommes et les femmes de gauche créa le Parti Congolais de Travail (PCT), dont le congrès constitutif eu lieu du 26 au 31 décembre 1969.
Dès le départ, il fonda son action sur les principes du marxisme léninisme afin je le redis de bâtir par étapes une société socialiste au Congo. Comme tout marxiste, le président Marien Ngouabi était convaincu de ce que la lutte des classes entre les bourgeois et les prolétaires étaient le moteur de l’histoire. La révolution était selon lui le seul moyen de bannir à jamais l’exploitation de l’homme par l’homme au Congo. Aussi, revenait-elle au cœur de tous ses propos c’est-à-dire que la refondation du PCT comme instrument de réalisation de la société nouvelle devenait plus que nécessaire. L’idée du fondateur de notre parti était d’emmener les paysans, les ouvriers ainsi que la jeunesse et les intellectuels de notre pays à devenir les acteurs principaux des mutations politiques, économiques et sociales. C’est dans cette perspective qu’il écrivit son principal ouvrage « Vers la construction d’une société socialisme en Afrique. », en février 1970. Son credo était d’affranchir le peuple de toute forme de domination et d’aliénation idéologique, culturelle, et économique. Aussi fallait-il, lutter résolument contre le néocolonialisme, l’impérialisme et leurs relais locaux.
Rappelons au passage que le PCT, fut en Afrique noire, le premier parti politique qui, dans les années 70, s’engagea de la manière la plus résolue à la voie de la construction à terme de la société socialiste, en choisissant le socialisme scientifique comme philosophie de base de son action. Mais cette prise de position radicale non appréciée de tous ne fut pas sans douleur.
En effet, c’est à travers les multiples successions de crises, parfois intenses que le parti évolua, progressa, et se forgea à un tempérament d’acier.
Ainsi, trois mois seulement après sa création, le 31décembre 1969, le PCT subi son premier choc, le 23 mars 1970, avec le coup d’Etat du lieutenant Kinganga. Le parti convoqua alors son premier congrès extraordinaire qui se tint à Brazzaville du 30 Mars au 1er Avril 1970.
Le 22Février 1972, le PCT vécu une deuxième crise politique grave en son sein avec le mouvement dit M22, en référence aux évènements du 22 Février 1972.
Un deuxième congrès extraordinaire eu lieu du 27 au31 décembre 1975, à la suite de profonde dissension au sein de la direction du parti et le comité central, dysfonctionnement général de l’appareil de l’Etat, avec l’apparition d’un fossé. Une démobilisation profonde entre la base et le sommet. S’en suivit que le bureau politique démissionna et fut remplacé par un état major général révolutionnaire de cinq membres. Une deuxième refondation de l’ère monopartisme était en cours. Elle fut hélas interrompue le 18 Mars 1977 par le lâche assassinat du président Marien Ngouabi. Un Comité Militaire du Parti (CMP), fut chargé d’organiser les obsèques et d’assurer la continuité de l’Etat jusqu’à la tenue du 3ème congrès extraordinaire du PCT. Celui-ci se tint du 26 au 30 Mars 1979, et porta le camarade Denis Sassou Nguesso à la tête du parti et à la magistrature suprême.
La mort du président Marien Ngouabi coïncide avec les changements qualitatifs au niveau national et international. C’est pourquoi je voudrais faire un peu d’histoire : Le monde de Yalta, bipolarisé en deux blocs avec les Etats Unis d’Amériques(USA), à la tête des pays occidentaux et l’URSS à la tête des pays de l’est vola en éclat. Il fut ainsi crée les conditions d’appropriation de la démocratie, c’est à dire la promotion des libertés individuelles et collectives à l’échelle planétaire et l’émergence d’une nouvelle citoyenneté d’essence universelle. Par conséquent, la redéfinition de la carte géopolitique du monde en face de nouveaux enjeux était devenue impérative pour quiconque ne voulait pas se retrouver en décalage avec le cours de l’histoire. Aussi, les partis politiques qui se réclamaient du marxisme léniniste devaient-ils demeurer dans leur posture ?...
"Noumaz" n’a rien oublié de la rhétorique marxiste et le ton de son discours semble aussi suranné que les idées qu‘il professe. Après vingt cinq ans de pouvoir, la vielle classe politique et le PCT en particulier « ...qui a eu le mérite d’avoir profondément marqué la mémoire collective des congolais... » comme le dit Edouard Ambroise Noumazalaye, a été rattrapé par son échec politique et économique par une humiliation à la Conférence Nationale Souveraine (CNS).
Denis Sassou Nguesso s’étonne de ce revers au sortir de ce " mbongui" national :
« Ambroise, vraiment nous n’avons rien fait dans ce pays pour être aussi vilipendés ?
– Monsieur le président, le peuple veut toujours plus. Si vous lui donnez la main, il veut le bras.
– Alors, faites- moi l’autocritique et la remise en cause de notre action ! »
Ce dialogue déclencheur de la refondation du PCT et les multiples guerres fratricides sont-ils le fondement de la refondation du paysage politique du Congo ou alors le regroupement d’un clan, las de guerroyer, en quête d’une pérenne appropriation de l’espace politique congolais ?
Le transfuge Bernard Kolelas, aurait déclaré ne jamais avoir renié l’alliance avec le PCT. Bien sûr ni avec le RDPS et l’UPADS. Actuellement aux bons soins de la république après avoir été banni et menacé d’éventuelles poursuites judiciaires dès son retour au Congo. Il serait sous la protection de l’alliance. Reste le professeur Pascal Lissouba, accusé de manger dans la main de Sassou depuis belle lurette. Dans un futur proche, il devrait apporter au pays des ingrédients d’une salade politique indigeste.
Si ce n’est pas une fiction, peut-on avoir au Congo un grand parti politique sans le PCT, le MCDDI et l’UPADS ? De là, à croire que le PCT et l’UPADS ont signé un accord de gouvernance au sortir de la Conférence Nationale Souveraine, les esprits éveillés voient là un tour de passe-passe d’une classe politique envoie de disparition. Le jeu des chaises musicales n’est pas près de disparaître, un jour je t’aime, le lendemain je te hais, le cirque politique n’est qu’un éternel recommencement. Quid du pluralisme ?
Ambroise Noumazalaye, prétend que c’est dans le but d’une passation de témoin indolore entre la vielle et la nouvelle classe politique et dans l’éradication des partis politiques à coloration ethnique que réside la motivation de la refondation politique nationale. C’est de la langue de bois version grand art. Mais rien n’a jamais été si beau, si machiavélique, si bien ordonné que les milices de Sassou, Kolelas, et Lissouba. Les canons, les pillages, les viols, la destruction systématique de la nation en un mot, ont formé une harmonie telle qu’il n’y en a jamais eu chez Lucifer. Les congolais ont vécu leur enfer et ils ne parviennent pas à en sortir.
Au sein du PCT, le vieux briscard politique Lekounzou s’accroche aux icônes et aux symboles, d’un PCT à jamais périmé, soutenant une refondation structurelle alors que Noumazalaye fait la promotion d’un nouveau parti, pas plus crédible avec adhésion à la clé. Quoi qu’il en soit, "le mystérieux deal" des fidèles continuateurs de l’œuvre de Marien Ngouabi est brisé.
Parions que la scène politique congolaise nous réserve des surprises.