Ntoumi repêché par Sassou

Le décret de nomination de Ntoumi au poste de « délégué général près la présidence chargé de la promotion des valeurs de paix et de la réparation des séquelles de guerre » a été signé par Sassou le 20 mai 2007 avant de s’envoler pour Paris pour une visite privée. La volonté de paix de Ntoumi est mise à l’épreuve. Il devra (sous la direction du général Adoua, commandant de la zone militaire de Brazzaville) incinérer les armes qu’il détient. C’est un Ntoumi politiquement fort et militairement faible qui va débarquer à Brazzaville, lui qui a encore récemment proclamé haut et fort son appartenance à l’Opposition et exigé la constitution d’une Commission électorale indépendante, ironisant même sur le recensement de la population qui n’a jamais été fait dans le Pool.

Nous savons que le Premier Ministre Isidore Mvouba vient de confirmer la tenue des élections législatives en juin 2007 . Quelle sera l’attitude du nouvel allié de Mpila ? Du reste comment peut-on passer, en l’espace d’un mois, de la critique à l’adhésion ? Un vrai virage à 180 degrés. Kolélas qui, avant lui, a effectué le même virage, a d’ores et déjà invité ses militants à aller voter massivement, coupant l’herbe sous les pieds de l’Opposition tentée par le boycott.

Est-ce le début d’un partenariat politique entre le PCT et le CNR ? Le CNR compte-t-il rejoindre le MCDDI de Kolélas déjà allié avec le PCT ?
Comment va se dérouler la cohabitation entre les trois hommes ( Sassou, Kolélas et Ntoumi ) ? On peut s’attendre au meilleur comme au pire dans les jours à venir. Le meilleur serait la paix dans le Pool, la libre circulation des biens et des hommes ; et le pire serait l’implosion dues aux intérêts divergents de chacun.

A quand le retour de" l’exilé de la forêt vierge" à Brazaville ? Où sera logé l’ex-rebelle dans une ville aussi étroite que la capitale congolaise ? Dans la villa de l’ancienne Fac des Sciences d’où avaient été délogés ses miliciens voici deux ans ou à côté de kolélas dans le quartier de la Cathédrale ? Une belle lutte de territoire en perspective entre les trois forces. Ntoumi avec son ego surdimensionné acceptera-t-il d’être sous les ordres d’Adoua, le commandant militaire de la place de Brazzaville ? Lui qui était un grand seigneur (voire un petit roi) dans sa forêt de Loukouo, acceptera-t-il d’être simple sujet à Brazzaville, comme Kolélas ? Avec toutefois cette différence que Kolélas bénéficie du soutien indéfectible de ses militants comme l’a montré son dernier meeting au Centre Sportif de Makélékélé le 12 mai 2007.

Y a-t-il réelle volonté de paix de la part de Sassou ou voudrait-il attirer son ennemi de toujours sur son terrain pour mettre fin à son invincibilité ; histoire d’éliminer un allié officieux devenu encombrant comme dans la mafia quand on a été l’homme à tout faire ? Car les rapports entre Sassou et Ntoumi sont très ambigus. Le général Bouissa Matoko s’attira les foudres de Sassou pour avoir rencontré Ntoumi dans la forêt. Que découvrit-il qui lui coûtât d’abord la liberté de parole puis la vie ? Personne ne le saura. Il emporta dans sa tombe la vérité sur le deal entre les deux va-t-en-guerre.

Après s’être évités mutuellement depuis son retour d’exil, kolélas et Ntoumi seront obligés, enfin, de se serrer la main sous l’œil goguenard de Sassou, le maître de cérémonie. On aime ou on n’aime pas Sassou, il faut reconnaître que, là, il vient de marquer un point. Ou, comme dirait de Gaulle, il vient de gagner une bataille. Mais une bataille ne fait pas toute la guerre.

Benjamin Bilombot Bitadys