Roxyl Thanket :Bonsoir Bob, tu es français d’origine congolaise, tu as bonne prestation dans les médias français, nos lecteurs peuvent-ils en savoir plus sur toi ?
Bob Ebaka : Je suis arrivé en France en 87. J’ai successivement résidé à Paris et à Amiens. Aujourd’hui, je suis installé à Reims où nous avons monté une station de radio typiquement tropicale du nom de Soleil-Média. Nous avons le bonheur qu’elle soit considérée aujourd’hui comme la première radio africaine de la région. C’est le résultat de neuf années de travail acharné. J’y suis directeur de programme et monsieur Fofana, qui nous accompagne dans notre dixième année d’existence et auquel je rends hommage en est le directeur. C’est grace à cette popularité que je compte me présenter aux élections municipales dans deux ans en espérant poursuivre notre combat au sein du conseil municipal.
RT :Bob, comment es-tu arrivé aux médias ?
BE :Disons que quand j’étais encore très jeune, à dix sept ans j’avais un bar dans le quartier Ouenzé, pour ceux qui connaissent la ville de Brazzaville, c’est le cinquième arrondissement de la capitale. J’ai donc décidé une fois arrivé en France de rester dans le créneau, en animant les mariages, les baptêmes, les soirées ensuite nous avons monté une association que nous avons dénommée la PAC, cette association nous a permis de monter un projet radio. Dès que nous avons reçu l’autorisation d’émettre, nous l’avons dénommée Soleil-Média. Nous couvrons deux cent cinquante kilomètres, donc la Loraine, Champagne,
l’Alsace, la frontière Allemande et Mulhouse. Voilà comment je me suis retrouvé dans les médias. J’ai pris le micro et je me suis jeté à l’eau, j’ai appris sur le tas.
RT :Peut-on connaître l’audience de votre radio ?
BE : Aujourd’hui nous sommes considérés comme première radio africaine de la région cela veut dire que nous avons des auditeurs et auditrices dans tout l’est de la France, à partir de là, j’ose dire que nous avons un très bon quota d’audience. Evidemment, ça change un peu d’avec les radios comme Europe 1, Sky-Rock, Energie... Bon, RFI c’est quand même la radio mondiale. Ma foi, je pense que dès qu’on va couvrir Paris on changera de statut.
RT : Alors Bob, comment se comporte la musique du Congo Brazza, en France et sur radio Soleil-média ?
BE : Sur radio Soleil-média, nous passons de la musique tropicale. Il faut savoir qu’en France nous sommes soumis à des quotas. Nous devons diffuser obligatoirement 50% de de musique française au minimum. Bien sûr nous avons la chance que le Zouk soit de la musique française, donc nous diffusons beaucoup de zouk. Les autres 50% c’est le RnB, c’est de la muzak, beaucoup de musique africaine, Abidjan du coupé décalé, et de la musique congolaise. Il faut savoir que le musique congolaise est l’une des plus vendues dans le monde entier. Quand nous allons au Sénégal nous ne pouvons pas trouver un bar sans musique congolaise. Il ne peut pas y avoir une boite, n’importe où dans le monde, même aux Etats Unis, en Europe, en Hollande où la musique congolaise ne batte pas son plein. mais en arrivant par ici, j’ai été surpris de voir que JB Piana et Werra Son sont joués dans presque tous les bars. Moi je suis perdu avec toutes ces musiques car je ne les connais pas toutes, bien sûr je les reçois à la radio. Chez nous, des groupes comme Extra Musica de Roga Roga marchent excessivement bien, il y a Patrouille de Stars qui commence vraiment a rentrer dans son domaine. Dites vous que quand vous commencez à vous faire écouter en Afrique de l’Ouest, dans les boites, dans les bars, vous allez gagner le marché. J’estime que la musique du Congo Brazzaville est l’une des premières musiques vendues dans le monde.
Lors de mon dernier voyage aux Antilles, je n’ai jamais entendu JB Piana ou Werra Son, de temps en temps Koffi Olomidé. Par contre Extra Musica, Patrouille de Stars, Z1 International aussi qui fait des albums qui y sont très écoutés. C’est parce que ils ont un « sébène », je pense qui attire plus les étrangers que les « sébènes » de nos confrères du Congo Kinshasa que je respecte. On dira que je suis nationaliste, mais charité bien ordonnée commence par soi même, donc j’ai préféré pousser d’abord mes gamins, et après mes gamins j’essaie de pousser les autres. Je viens de découvrir le dernier album de Koffi, celui de Zangul, j’ai écouté ça dans ma chambre d’hôtel, et si j’ai trouvé que c’est du bon boulot, je n’ai pas trouvé ça supérieur à ce que font mes gamins, ceci dit ce sont les auditeurs qui décident. C’est vrai qu’il vous manque des producteurs, si on pouvait injecter ne fusse que le quart de ce qui est donné à certains musiciens, on verrait vraiment cette musique décoller. En tout cas il y a des groupes émergents, je veux parler par exemple de Kingoli, que j’ai découvert en arrivant ici, en les faisant retourner en studio, je pense que ces gamins y arriveront.
RT : Si on te demandait de faire un Hit de la musique congolaise.
BE : Mon Hit ! Ça c’est un piège. Piège pourquoi ? Parce que je commencerais par :
– Extra Musica de Roga, mais on me dira que c’est parce que je travaille depuis longtemps avec Roga. Pour moi Roga c’est le numéro 1 ;
– 2, Z1 International, ils sont perdus un peu dans le marché, mais ils font de la très bonne musique ;
– 3, Patrouille des Stars qui actuellement bat son plein ;
– 4 : Universal Zangul, qui sont dans la musique depuis près de quinze ans ;
– 5 : Kingoli.
Voilà mon Hit.
RT : Bob, ce bref retour au pays est-ce pour te ressourcer ?
BE : J’en avais besoin, je travaille beaucoup, je vais constamment en Afrique de l’ouest. Brazzaville et Pointe-Noire c’est là où j’ai passé toute ma jeunesse, jusqu’à mon départ à l’âge de dix sept ans en Europe. Aujourd’hui j’ai quarante ans, je suis comblé et ému de rentrer chez moi. Je crois qu’il y a une génération montante qui se lance dans les affaires, surtout ceux qui veulent faire la politique, il faut qu’ils se donnent à fond car il faut aider cette population. Il y a encore beaucoup de difficultés, j’ai fait des tours dans les quartiers, mais je laisse les politiques faire leur boulot, je ne veux pas rentrer en profondeur. Je préfère qu’on se concentre sur la musique.
RT : Cher confrère Bob Ebaka, avant que tu ne viennes au pays as-tu eu des relations avec quelques chroniqueurs et journalistes de la place ?
BE : Franchement non. A Pointe-Noire, non. A Brazzaville j’ai essayé, mais vous savez nous qui arrivons de l’extérieur, on veut essayer de mettre des bases pour nous exprimer,, mais c’est en vain. Nous rencontrons malheureusement certaines barrières, les gens essayent de mettre des quartiers, j’ai tenté plusieurs fois à proposer des émissions gratuites, je dis bien gratuites, j’avais juste besoin d’un support télévision ou radio. Bien il faut comprendre les gens. Je pense que nous sommes parti pour l’ouverture, Pointe-Noire a trois ou quatre télévisions actuellement. Il y a les satellites aussi, partout les gens commencent à s’ouvrir sur le monde. On ne pourra pas verrouiller les chaînes de télévision ou de radio, je crois que la libre antenne sera bien pour tous, les politiques devront libéraliser davantage certaines choses, ça sera bien pour eux, pour nous surtout pour nos enfants qui arrivent, vous savez quand on parle du Congo à l’extérieur c’est une fierté.
RT : Bob, en te suivant à propos de la musique congolaise, tu as parlé des producteurs qui hésitent à produire les musiciens congolais, que peux- tu leur dire ?
BE : Non ce n’est pas ce que j’ai dis ! Je dis qu’ils n’y croient pas, ils préfèrent aller donner l’argent à Koffi Olomidé, JB Mpiana, Werra Son, pour avoir les « mabangas » [1] comme on dit, pour eux les « mabangas » des groupes congolais ne sont que dalle. Je reviendrais sur Roga parce que je le suis depuis bientôt dix ans ça commence à payer. Aujourd’hui, il vient d’avoir un bon producteur qui prépare "La main noire" vous allez écouter la qualité du son et du mixage, parce qu’il y a eu un producteur congolais qui a eu l’audace de mettre beaucoup de pognons sur l’artiste. Le peu de temps que je suis à Pointe-Noire, j’ai vu la promotion de l’album d’Universal Zangul, je ne connais pas ce monsieur, mais je crois qu’il a mis des moyens pour cette œuvre car cet album n’a pas encore fait deux mois mais je sens le tapage médiatique.
RT : Bob, pour finir notre entretien, si tu nous parlais un peu de l’expertise que tu as pu faire sur les médias congolais ?
BE : Franchement je n’ai pas eu l’occasion de faire tous les médias, je rentre la semaine prochaine et je reviendrai pour mieux observer les médias congolais. Je vous confirme que nous jeunes congolais qui sommes à Reims avons actualisé en 2005 le jumelage entre la ville de Reims et celle de Brazzaville, signée par le président Youlou en 1963. Je tiens féliciter le député-maire de la ville de Brazzaville monsieur Hugues Ngouelondélé, qui a fait un grand travail pour cette relance. Suite à cela, je crois que Pointe-Noire, qui doit être jumelée à la ville du Havre, étende cette coopération vers la ville de Reims. N’oubliez pas que Reims est l’une des villes les plus riches de France. Eu égard à cela, je souhaiterais rencontrer le député-maire de la ville de Pointe-Noire monsieur Roland Bouity-Viaudo, car je pense qu’il y a de quoi faire et pour Brazzaville et pour Pointe-Noire.
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