Dans l’après-midi du même jour, certains éléments de la brigade aéroportée s’étaient livrés au racketage et intimidation des passants vers la Frontière, quartier situé aux abords sud de l’aéroport de Maya Maya, à Brazzaville, emportant ainsi à l’occasion tout ce que ceux-ci avaient sur eux.
Pourtant ce comportement et cette attitude - qui jusqu’aujourd’hui ne s’expliquent et au fond ne sont que le manque de professionnalisme dans les forces armées congolaises (FAC) - n’étaient que la réaction des militaires d’une certaine catégorie à l’annonce surprise de Haut Commandement des FAC de la perception de leur solde dans leur corps d’appartenance, au lieu des guichets des CCP, comme de coutume.
En effet, le ministère de la défense et l’Etat major, par le biais de la Direction des affaires financières de l’Armée, voulaient procéder au nettoyage des fichiers du Service solde des FAC par un contrôle systématique des salaires mensuels perçus par chaque soldat.
Cette opération a été motivée par la découverte d’une fraude salariale massive au sein de l’Armée. Il été mis à l’évidence que plus de 80% étaient dans le faux et percevaient indûment des soldes qui ne correspondaient pas à leur statut et grade. Rien qu’au CCP, les finances publiques ont réalisé des pertes mensuelles de plus de 6 millions de FCFA pour cause de trop perçu pendant plusieurs années.
C’est ainsi qu’il a été décidé de combiner le contrôle physique et le versement de la solde du mois de mars de chaque bidasse à la caserne, en présence de son chef de corps, afin de débusquer et d’attraper tous les fraudeurs. Au finish, il a été établi des évidences sur la base de bulletins de solde entre autres de soldats et sous officiers percevant des salaires de grades supérieurs à ce qu’ils sont réellement et de certains militaires en fonction au Congo mais traités au rang de diplomate.
Le rapport établi à la suite de cette opération révèle que toute cette magouille avait été orchestrée par la Division Solde des FAC. La corruption et la falsification des documents administratifs sont les moyens les plus utilisés pour bénéficier d’une augmentation de salaire dans la fonction publique. Dans les FAC, du fait de l’application immédiate des effets financiers inhérents à tout avancement et toute promotion, cette pratique a connu une grande envergure au cours de ces dernières années.
Le scannage d’un arrêté, suivi de l’insertion du nom d’un caporal par exemple dans la liste de nouveaux commandants promus, ensuite l’introduction du document modifié à la Solde —moyennant une certaine somme d’argent — et enfin dans les mois qui suivent, le caporal perçoit le salaire d’un commandant. Le jeu est ainsi fait. Telle est la voie classique souvent utilisée. Une autre façon d’élever son sa solde consiste en la déclaration abusive de la paternité d’enfants en montant un dossier composé d’actes de naissances falsifiés.
Après les CCP, les contrôles devraient se poursuivre dans les différentes banques de la place. Tout cela est bien beau. On lutte contre la corruption et le détournement des fonds publics. Quel serait le sort réservé aux fraudeurs ? Comment les trop perçus seront-ils remboursés ? Apparemment rien n’est encore proposé. Le Haut Commandement hésite à prendre des décisions et des sanctions par crainte d’une éventuelle mutinerie au sein des Forces armées congolaises, murmure t-on dans les casernes.