Mardi 7 décembre 2004, 10h41. - Le chanteur congolais Zao a donné vie à l’"ancien combattant" qui a survécu à "la guerre mondiaux". Lui-même donné pour mort lorsqu’il a dû se réfugier dans la forêt pour échapper à la guerre, il en a réchappé et, aujourd’hui, veut chanter à la maison et "prendre (sa) bière tranquillement".
"Je suis en train de partir à la retraite, j’ai presque 52 ans aujourd’hui. J’ai été amputé de mes projets. Je veux jeter l’éponge, me retirer de la scène", affirme Zao qui a rencontré la presse dans la capitale sénégalaise, à l’issue du 4è festival de musique Africa Fête, vendredi.
Le chanteur se dit gagné par le "découragement" mais n’a pas pour autant perdu le sens de l’humour qui marque ses chansons.
Quand on lui demande, par exemple, ce qui s’est passé pour qu’on ait annoncé son décès, il y a quelques années, il répond en souriant : "Peut-être parce que j’ai chanté +Corbillard+", histoire d’un mort qui ne veut pas aller au cimetière et tente de faire rebrousser chemin au véhicule funéraire.
Puis il se fait sérieux, presque grave, en évoquant les guerres civiles ayant secoué en 1997 et 1998 les départements du sud de son pays et la capitale, Brazzaville.
"Je suis originaire du Pool (sud). Il y a eu la guerre chez nous. On était réveillé par les coups de Kalachnikov. J’ai fui dans la forêt", explique-t-il, en précisant y être resté "neuf mois, sans contact, sans rien".
"Dieu merci, je n’ai pas trouvé la mort, mais on a annoncé que j’étais décédé à la radio", ajoute-t-il.
Enseignant de formation, Zao présente aujourd’hui le physique d’une personne bien nourrie, aux joues rondes, à plusieurs années et épaisseurs du jeune homme mince de ses débuts en solo, dans les années 1980.
Casimir Zoba, de son vrai nom, est né à Goma Tsé-Tsé, dans le Pool (à 25 km de Brazzaville), selon une biographie publiée par le site Internet de RFI-Musique (http://www.rfimusique.com).
Distingué par le prix "Découvertes" de Radio France internationale (RFI) pour son titre "Sorcier ensorcelé", il rencontre véritablement le succès avec "Ancien combattant", un de ses premiers et plus fameux tubes dans lequel un ancien tirailleur raconte, dans son français à lui, les horreurs de la guerre : "le peuple cadavéré" (tué), "tout le monde affamé, "les enfants bombés" (bombardés) et même "la poule qui ne poule plus les oeufs"...
Depuis, sur scène et à la télévision, Zao a chanté, caricaturé, mimé, empruntant parfois aux personnages de ses chansons leur ton aviné ou leur panoplie, comme les casques, treillis et médailles militaires de l’"Ancien combattant").
Il a encore beaucoup distrait samedi soir au stade Iba Mar Diop de Dakar, lors du dernier concert d’Africa Fête en compagnie de Salif Keïta (Mali), Omar Pène, Coumba Gawlo Seck, Alioune Mbaye Nder (Sénégal) et Faso Kombat (Burkina Faso).
Mais il ne veut plus continuer, en raison notamment de déboires dans le milieu : "J’emmène huit musiciens à Paris, cinq d’entre eux fuient. J’arrive à Brazzaville, je suis mal vu à l’ambassade de France. Ca décourage !"
"On essaie d’éteindre le feu, on chante, on chante... Mais parfois, le pompier aussi se fatigue", poursuit-il. "Et puis, il n’est pas possible de chanter tout le temps les malheurs. Le monde recule au lieu d’avancer".
"Je n’ai plus de projets, sauf (celui) de chanter chez moi et prendre ma bière tranquillement", assure-t-il.